mardi 18 mars 2014

Dettes illégitimes : les sauvetages bancaires



Dettes illégitimes en Belgique : les sauvetages bancaires

Cet article fait référence à la fusion de deux banques, l'une belge et l'autre française, mais renvoi inéluctablement au financement des Etats par le "Marché". Financement où les États sont pris en otage d'agences privés qui sous prétextes d'une "santé" financière aléatoire, décident unilatéralement du taux de l'emprunt contracté par un Etat. Autrement dit le "Marché" sous un prétexte fallacieux (un État, par exemple qui ne suivrait pas exactement les directives du "Marché" se verrait pénalisé, sous des auspices, bien entendu, économiques). Le but de cette politique est d'assujettir les NATIONS, donc les populations, au dictat de la finance et de l'argent, cautionné par les populations elles-mêmes, étant donné que la prise de risque de la spéculation à laquelle se livrent les établissements financiers, est garantie, y compris contre leur gré, par les populations au bénéfice d'aigrefins. En effet, il est facile de comprendre que la spéculation n'apporte rien à l'économie réelle, à la société. Par contre  les pertes des uns enrichissent les autres. Là où le "bas blesse" c'est que les populations sont écartées des bénéfices des uns et participent à la perte des autres.
Autrement dit: on nationalise mes pertes et on privatise les bénéfices.
C'est exactement sur ce chemin que nos gouvernants nous "guident". Appauvrissement des populations au bénéfice des "élites" financières, politiques.

Nous n'avons pas d'autre solution, soit nous élisons des personnalités honnêtes ou il faudra, a plus ou moins logue échéance, refaire 1789...
Naturellement parler d'un quelconque "COMPLOT" parait inapproprié, il y a cependant collusion entre les tenants de la mondialisation, contre les populations mondiales. Il suffirait, pourtant, de désigner les coupables pour qu'un début de guérison, pointe à l'horizon. La réflexion que nous devons mener est de savoir qui est à l'origine des "CRISES", qui est le principal bénéficiaire de l'actuelle déstabilisation du Monde.            

À partir de l’automne 2008, une vaste opération de socialisation de dettes privées a eu lieu en Belgique : 33 milliards d’euros ont été empruntés par l’Etat sur les marchés financiers pour sauver les institutions financières privées Fortis, Dexia, KBC et Ethias. Ces sauvetages bancaires ont entraîné une augmentation importante de la dette publique de la Belgique, équivalente à 1/10ème de la totalité de la dette publique de l’époque. Cette dette issue des sauvetages bancaires est illégitime car elle n’a pas profité à la majorité de la population et ce, pour au moins quatre raisons.

La banque Dexia est née de l'alliance en 1996 entre le Crédit communal de Belgique (1860) et le Crédit local de France (1987), société anonyme à caractère commercial issue de la privatisation de la CAECL (Caisse d'aide à l'équipement des collectivités locales), un établissement public administratif, dont la vocation première était de répondre aux besoins des collectivités locales.

1) L’Etat a payé trop cher ces sauvetages bancaires
Yves Leterme et Didier Reynders, qui occupaient au moment du sauvetage des banques les postes respectifs de Premier Ministre et de Ministre des Finances, déclaraient en 2013 que « nous avons sauvé les banques de la meilleure façon qu’il nous était donné de faire et dans l’intérêt de la population » |1|. Or, la Commission Européenne a estimé quelques mois après cette annonce que l’État avait déboursé entre 1 et 2 milliards de trop pour racheter Belfius |2| (la branche belge du groupe Dexia). Ces propos ont ensuite été confirmés par le Ministre des Finances actuel, Koen Geens. Depuis, le même Didier Reynders déclara à propos de Fortis qu’ « on aurait aussi pu se demander si au lieu de payer 4,7 milliards on n’aurait pas dû payer 1 euro symbolique » |3| !

2) L’Etat ne récupérera jamais la totalité de l’argent injecté dans ces sauvetages
Didier Reynders (toujours) a affirmé à maintes reprises que ces sauvetages constituaient des investissements qui, à terme, bénéficieraient à la population.... Or, en 2014 seulement la moitié de l’argent injecté en prêts ou en recapitalisations |4| dans ces banques a été remboursé aux pouvoirs publics |5|. Nous sommes donc loin du compte. Mais surtout ces chiffres bruts n’incluent pas les intérêts que l’État va devoir payer sur ces 33 milliards empruntés, ni les futures sommes qu’il risque d’encore devoir dégager, notamment pour recapitaliser Dexia S.A. (qui a déjà été recapitalisée trois fois).
Ne perdons pas de vue non plus que les banques sont à l’origine de la crise et que cette crise a pour effet d’augmenter la dette publique du fait notamment de la baisse des recettes fiscales et de la récession. La dette publique est ainsi passée de 84 % du PIB (soit 285 milliards d’euros) au début de la crise à plus ou moins 100 % aujourd’hui (soit 395 milliards d’euros).
3) Ces sauvetages n’étaient pas démocratiques
Il faut souligner que les partis membres du gouvernement se sont présentés devant l’électeur en affirmant qu’ils mettraient fin aux comportements inacceptables des banques (y compris le MR et le VLD). Ils ont affirmé qu’une nouvelle discipline serait imposée. Ces partis ont donc clairement abusé de la confiance de l’électorat. Dans une démocratie, les représentant-e-s une fois sorti-e-s des urnes n’ont pas le mandat de faire n’importe quoi...
Le fait que des parlementaires valident ces sauvetages ne change en rien leur caractère illégitime. Il ne faut pas confondre « dette illégale » et « dette illégitime ».
Une dette illégitime, qui a été contractée au nom de l’ensemble de la population alors qu’elle ne lui a pas profité, n’a aucune raison d’être remboursée par celle-ci. En effet, l’obligation de rembourser une dette publique n’est pas absolue et ne vaut que pour des dettes contractées dans l’intérêt général de la collectivité |6|.

Une dette illégitime, qui a été contractée au nom de l’ensemble de la population alors qu’elle ne lui a pas profité, n’a aucune raison d’être remboursée par celle-ci

Pour illustrer la différence entre « illégal » et « illégitime » prenons l’exemple de la garantie de l’Etat apportée aux créanciers de Dexia S.A. Pour rappel, le Parlement fédéral a validé en mai 2013 de manière rétroactive l’arrêté royal pris illégalement par le gouvernement (en affaires courantes) de 2011, complété par un autre arrêté en 2012, qui engagent l’État à garantir les dettes de Dexia S.A à hauteur de 43,7 milliards d’euros (soit 11% du PIB de la Belgique, sans compter les intérêts et les accessoires) jusqu’en 2031. La violation de la Constitution belge était flagrante car les parlementaires n’avaient même pas été consultés sur ces garanties alors que cette matière relève de leur compétence. C’est ce que le CADTM a démontré devant le Conseil d’Etat dans sa requête en annulation de ces deux arrêtés royaux introduite avec ATTAC Liège, ATTAC Bruxelles 2 et deux députées fédérales, Zoé Genot et Meyrem Almaci.

Depuis le vote du Parlement en 2013, cette garantie est donc légale. Cependant, elle reste illégitime. En effet, cette garantie porte sur une « bad bank » qui ne contient aucun dépôt d’épargnant et elle est extrêmement dangereuse pour la population. Si la garantie est activée, les dettes de Dexia S.A. deviendront automatiquement des dettes de l’Etat belge. Ce qui entraînera le renforcement des mesures d’austérité contre la population pour rembourser les dettes léguées par les activités de Dexia S.A. On sera alors en présence de nouvelles dettes illégitimes. Ce risque est aggravé par le fait que l’octroi de garanties n’a été soumis à aucune condition de la part du gouvernement belge. Ce qui encourage les banques, se sachant protégées par l’État, à continuer à prendre des risques financiers au détriment de la collectivité. C’est ce qu’on appelle l’ « aléa moral ».

4) Rien n’a changé et d’autres sauvetages bancaires sont à prévoir
Rien de sérieux n’a été fait en termes de régulation bancaire depuis la crise. Malgré les promesses de changements de la part des dirigeants politiques, les réformes tant attendues n’ont jamais vu le jour.
L’Etat n’a pas profité de ses prises de participations dans ces banques pour changer les règles du jeu et rendre le secteur bancaire plus sûr et au service de la population. En effet, la séparation des activités bancaires (banque de dépôt d’un côté et banque d’investissement de l’autre) |7| n’est plus à l’ordre du jour tandis que le secret bancaire reste d’actualité. Les activités spéculatives ont repris de plus belle ainsi que les bonus et les salaires mirobolants. Le crédit aux ménages et aux petites et moyennes entreprises (PME) n’a pas augmenté et la banque Belfius (pourtant à 100% public) fonctionne comme n’importe quel banque privée sans prendre en compte l’intérêt du public. Soulignons également que les licenciements au sein de ces institutions se multiplient.

(Banque de dépôt d’un côté et banque d’investissement de l’autre)
Banque de dépôt:
Banque de dépôt ou Banque commerciale. Établissement de crédit effectuant des opérations de banque avec les particuliers, les entreprises et les collectivités publiques consistant à récolter des fonds pour les redistribuer sous forme de crédits ou pour effectuer à titre provisoire des opérations de placement.
Les dépôts publics bénéficient d'une garantie d’état. Une banque de dépôts (ou banque commerciale) se distingue d'une banque d'affaires qui essentiellement des opérations de marché.    
Pendant plusieurs décennies, suite au Glass Steagall Act adopté pendant l'administration Roosevelt et aux mesures équivalentes prises en Europe, il était interdit aux banques commerciales d'émettre des titres, des actions et tout autre instrument financier.
Banque d’investissement:
Société financière dont l'activité consiste à effectuer trois types d'opération : du conseil (notamment en fusion-acquisition), de la gestion du haut de bilan pour le compte d'entreprises (augmentation de capital, introduction en bourse, émissions d'emprunts obligataires) et des placements sur les marchés avec des prises de risque souvent excessives et mal contrôlées.
Une banque d'affaires ne collecte pas de fonds auprès du public, mais se finance en empruntant aux banques ou sur les marchés financiers.


Parce que nous avons payé trop cher ces sauvetages et que nous sommes loin d’y avoir « gagné », parce que cela n’a pas servi à changer les règles du jeu et que, s’il fallait sauver l’épargne des citoyens et le secteur bancaire en Belgique, il fallait le faire autrement |8|, parce que ces sauvetages ont profité à une minorité de gros détenteurs de capitaux et non à la majorité de la population qui en paie les frais, et risque de payer de nouveaux sauvetages, la dette de 33 milliards d’euros générée par les sauvetages bancaires est une dette illégitime. Il n’y a donc aucune raison à ce que la population la rembourse. L’annulation de cette dette doit viser les responsables de la crise : les banques et leurs gros actionnaires, qui sont à la fois les principaux créanciers de la Belgique et les bénéficiaires des sauvetages publics !
À l’occasion d’une annulation des dettes publiques, il conviendra de protéger les petits épargnants qui ont placé leurs économies dans des titres publics ainsi que les salariés et les retraités qui ont vu une partie de leurs économies (épargne pension, assurance groupe, assurance vie) placées par les institutions ou les organismes gestionnaires dans ce même type de titres.
L’annulation de la dette publique illégitime est une mesure nécessaire mais non suffisante pour sortir de la crise. Une des mesures complémentaires urgentes pour éviter de voir de nouvelles crises financières éclater est de socialiser le secteur bancaire.

Notes
|1| Voir « Leur crise, 5 ans après... », septembre 2013.
|2| Voir « l’État a payé trop cher pour Belfius » de l’Echo du 30 janvier 2014.
|3| Voir le dossier « Inside Fortis » de l’Echo du 19 septembre 2013.
|4| 19,2 milliards en prises de participation dans le capital et 13,4 milliards par l’octroi de prêts, dont plus au moins 1/5e a été financé par les Régions.
|5| Pour plus de détails, lire « Sauvetages ou naufrages bancaires en Belgique ? », août 2013.
|6| Ruzié David, Droit international public, 17e édition, Dalloz, 2004, p. 93.
|7| À ce sujet, voir la campagne « Scindons les banques » sur www.scinderlesbanques.be/ ou encore la vidéo de Finance Watch "Pourquoi séparer les activités bancaires ?"
|8| Même s’il ne s’agit pas de modèles parfaits à suivre, d’autres manières de sauver les banques et l’épargne des citoyens ont été développées en Islande récemment ou dans la Finlande, Norvège et Suède des années 1990. Pour plus de détails, lire « Et si nous laissions les banques faire faillite ? » de Xavier Dupret, août 2012.

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