Dettes illégitimes
en Belgique : les sauvetages bancaires
Cet
article fait référence à la fusion de deux banques, l'une belge et l'autre
française, mais renvoi inéluctablement au financement des Etats par le
"Marché". Financement où les États sont pris en otage d'agences
privés qui sous prétextes d'une "santé" financière aléatoire,
décident unilatéralement du taux de l'emprunt contracté par un Etat. Autrement
dit le "Marché" sous un prétexte fallacieux (un État, par exemple qui
ne suivrait pas exactement les directives du "Marché" se verrait
pénalisé, sous des auspices, bien entendu, économiques). Le but de cette
politique est d'assujettir les NATIONS, donc les populations, au dictat de la finance
et de l'argent, cautionné par les populations elles-mêmes, étant donné que la prise
de risque de la spéculation à laquelle se livrent les établissements financiers,
est garantie, y compris contre leur gré, par les populations au bénéfice
d'aigrefins. En effet, il est facile de comprendre que la spéculation n'apporte
rien à l'économie réelle, à la société. Par contre les pertes des uns enrichissent les autres. Là
où le "bas blesse" c'est que les populations sont écartées des bénéfices
des uns et participent à la perte des autres.
Autrement
dit: on nationalise mes pertes et
on privatise les bénéfices.
C'est
exactement sur ce chemin que nos gouvernants nous "guident". Appauvrissement
des populations au bénéfice des "élites" financières, politiques.
Nous
n'avons pas d'autre solution, soit nous élisons des personnalités honnêtes ou il
faudra, a plus ou moins logue échéance, refaire 1789...
Naturellement
parler d'un quelconque "COMPLOT" parait inapproprié, il y a cependant collusion
entre les tenants de la mondialisation, contre les populations mondiales. Il suffirait,
pourtant, de désigner les coupables pour qu'un début de guérison, pointe à l'horizon.
La réflexion que nous devons mener est de savoir qui est à l'origine des "CRISES",
qui est le principal bénéficiaire de l'actuelle déstabilisation du Monde.
À partir de l’automne 2008, une vaste opération de
socialisation de dettes privées a eu lieu en Belgique : 33 milliards
d’euros ont été empruntés par l’Etat sur les marchés
financiers pour sauver les institutions financières
privées Fortis, Dexia, KBC et Ethias. Ces sauvetages bancaires ont entraîné une
augmentation importante de la dette publique de la Belgique, équivalente à
1/10ème de la totalité de la dette publique de l’époque. Cette dette issue des
sauvetages bancaires est illégitime car elle n’a pas profité à la majorité de
la population et ce, pour au moins quatre raisons.
La banque Dexia est née de l'alliance en 1996 entre le Crédit communal de Belgique (1860) et
le Crédit local de France (1987), société anonyme à caractère commercial issue de la
privatisation de la CAECL (Caisse d'aide à l'équipement des collectivités
locales), un établissement public administratif, dont la vocation première
était de répondre aux besoins des collectivités locales.
1) L’Etat a payé trop cher ces sauvetages bancaires
Yves Leterme et Didier Reynders, qui occupaient au moment
du sauvetage des banques les postes respectifs de Premier Ministre et de
Ministre des Finances, déclaraient en 2013 que « nous avons sauvé les
banques de la meilleure façon qu’il nous était donné de faire et dans l’intérêt
de la population » |1|. Or, la
Commission Européenne a estimé quelques mois après cette annonce que l’État
avait déboursé entre 1 et 2 milliards de trop pour racheter Belfius |2|
(la branche belge du groupe Dexia). Ces propos ont ensuite été confirmés par le
Ministre des Finances actuel, Koen Geens. Depuis, le même Didier Reynders
déclara à propos de Fortis qu’ « on aurait aussi pu se demander si au
lieu de payer 4,7 milliards on n’aurait pas dû payer 1 euro symbolique » |3| !
2) L’Etat ne récupérera jamais la totalité de l’argent
injecté dans ces sauvetages
Didier Reynders (toujours) a affirmé à maintes reprises
que ces sauvetages constituaient des investissements qui, à terme,
bénéficieraient à la population.... Or, en 2014 seulement la moitié de l’argent
injecté en prêts ou en recapitalisations |4|
dans ces banques a été remboursé aux pouvoirs publics |5|.
Nous sommes donc loin du compte. Mais surtout ces chiffres bruts n’incluent pas
les intérêts que l’État va devoir payer sur ces 33 milliards empruntés, ni les
futures sommes qu’il risque d’encore devoir dégager, notamment pour
recapitaliser Dexia S.A. (qui a déjà été recapitalisée trois fois).
Ne perdons pas de vue non plus que les banques sont à
l’origine de la crise et que cette crise a pour effet d’augmenter la dette
publique du fait notamment de la baisse des recettes fiscales et de la
récession. La dette publique est ainsi passée de 84 % du PIB
(soit 285 milliards d’euros) au début de la crise à plus ou moins 100 % aujourd’hui
(soit 395 milliards d’euros).
3) Ces sauvetages n’étaient pas démocratiques
Il faut souligner que les partis membres du gouvernement
se sont présentés devant l’électeur en affirmant qu’ils mettraient fin aux
comportements inacceptables des banques (y compris le MR et le VLD). Ils ont
affirmé qu’une nouvelle discipline serait imposée. Ces partis ont donc
clairement abusé de la confiance de l’électorat. Dans une démocratie, les
représentant-e-s une fois sorti-e-s des urnes n’ont pas le mandat de faire
n’importe quoi...
Le fait que des parlementaires valident ces sauvetages ne
change en rien leur caractère illégitime. Il ne faut pas confondre « dette
illégale » et « dette
illégitime ».
Une dette illégitime, qui a été contractée au nom de
l’ensemble de la population alors qu’elle ne lui a pas profité, n’a aucune
raison d’être remboursée par celle-ci. En effet, l’obligation de rembourser une
dette publique n’est pas absolue et ne vaut que pour des dettes contractées
dans l’intérêt général de la collectivité |6|.
Une dette illégitime, qui a été contractée au nom de
l’ensemble de la population alors qu’elle ne lui a pas profité, n’a aucune
raison d’être remboursée par celle-ci
Pour illustrer la différence entre « illégal »
et « illégitime » prenons l’exemple de la garantie de l’Etat apportée
aux créanciers de Dexia S.A. Pour rappel, le Parlement fédéral a validé en mai
2013 de manière rétroactive l’arrêté royal pris illégalement par le
gouvernement (en affaires courantes) de 2011, complété par un autre arrêté en
2012, qui engagent l’État à garantir les dettes de Dexia S.A à hauteur de 43,7
milliards d’euros (soit 11% du PIB de la Belgique, sans compter les intérêts et
les accessoires) jusqu’en 2031. La violation de la Constitution belge était
flagrante car les parlementaires n’avaient même pas été consultés sur ces garanties alors que cette matière relève de leur
compétence. C’est ce que le CADTM a démontré devant le Conseil d’Etat dans sa
requête en annulation de ces deux arrêtés royaux introduite avec ATTAC Liège,
ATTAC Bruxelles 2 et deux députées fédérales, Zoé Genot et Meyrem Almaci.
Depuis le vote du Parlement en 2013, cette garantie est
donc légale. Cependant, elle reste illégitime. En effet, cette garantie porte
sur une « bad bank » qui ne contient aucun dépôt
d’épargnant et elle est extrêmement dangereuse pour la population. Si la
garantie est activée, les dettes de Dexia S.A. deviendront automatiquement des
dettes de l’Etat belge. Ce qui entraînera le renforcement des mesures
d’austérité contre la population pour rembourser les dettes léguées par les
activités de Dexia S.A. On sera alors en présence de nouvelles dettes
illégitimes. Ce risque est aggravé par le fait que l’octroi de garanties n’a
été soumis à aucune condition de la part du gouvernement belge. Ce qui
encourage les banques, se sachant protégées par l’État, à continuer à prendre
des risques financiers au détriment de la collectivité. C’est ce qu’on appelle
l’ « aléa moral ».
4) Rien n’a changé et d’autres sauvetages bancaires sont à
prévoir
Rien de sérieux n’a été fait en termes de régulation
bancaire depuis la crise. Malgré les promesses de changements de la part des
dirigeants politiques, les réformes tant attendues n’ont jamais vu le jour.
L’Etat n’a pas profité de ses prises de participations
dans ces banques pour changer les règles du jeu et rendre le secteur bancaire
plus sûr et au service de la population. En effet, la séparation des activités
bancaires (banque de dépôt d’un côté et banque d’investissement
de l’autre) |7|
n’est plus à l’ordre du jour tandis que le secret bancaire reste d’actualité.
Les activités spéculatives ont repris de plus belle ainsi que les bonus et les
salaires mirobolants. Le crédit aux ménages et aux petites et moyennes
entreprises (PME) n’a pas augmenté et la banque Belfius (pourtant à 100%
public) fonctionne comme n’importe quel banque privée sans prendre en compte
l’intérêt du public. Soulignons également que les licenciements au sein de ces
institutions se multiplient.
(Banque de dépôt d’un côté et banque d’investissement de
l’autre)
Banque de dépôt:
Banque de dépôt ou
Banque commerciale. Établissement de crédit effectuant des opérations de banque
avec les particuliers, les entreprises et les collectivités publiques
consistant à récolter des fonds pour les redistribuer sous forme de crédits ou
pour effectuer à titre provisoire des opérations de placement.
Les dépôts publics bénéficient
d'une garantie d’état. Une banque de dépôts (ou banque commerciale) se distingue
d'une banque d'affaires qui essentiellement des opérations de marché.
Pendant plusieurs
décennies, suite au Glass Steagall Act
adopté pendant l'administration Roosevelt et aux mesures équivalentes prises en
Europe, il était interdit aux banques commerciales d'émettre des titres, des
actions et tout autre instrument financier.
Banque
d’investissement:
Société financière
dont l'activité consiste à effectuer trois types d'opération : du conseil (notamment
en fusion-acquisition), de la gestion du haut de bilan pour le compte
d'entreprises (augmentation de capital, introduction en bourse, émissions
d'emprunts obligataires) et des placements sur les marchés avec des prises de
risque souvent excessives et mal contrôlées.
Une banque
d'affaires ne collecte pas de fonds auprès du public, mais se finance en
empruntant aux banques ou sur les marchés financiers.
Parce que nous avons payé trop cher ces sauvetages et que
nous sommes loin d’y avoir « gagné », parce que cela n’a pas servi à
changer les règles du jeu et que, s’il fallait sauver l’épargne des citoyens et
le secteur bancaire en Belgique, il fallait le faire autrement |8|,
parce que ces sauvetages ont profité à une minorité de gros détenteurs de
capitaux et non à la majorité de la population qui en paie les frais, et risque
de payer de nouveaux sauvetages, la dette de 33 milliards d’euros générée par
les sauvetages bancaires est une dette illégitime. Il n’y a donc aucune raison
à ce que la population la rembourse. L’annulation de cette dette doit viser les
responsables de la crise : les banques et leurs gros actionnaires, qui
sont à la fois les principaux créanciers de la Belgique et les bénéficiaires
des sauvetages publics !
À l’occasion d’une annulation des dettes publiques, il
conviendra de protéger les petits épargnants qui ont placé leurs économies dans
des titres publics ainsi que les salariés et les retraités qui ont vu une
partie de leurs économies (épargne pension, assurance groupe, assurance vie)
placées par les institutions ou les organismes gestionnaires dans ce même type
de titres.
L’annulation de la dette publique illégitime est une
mesure nécessaire mais non suffisante pour sortir de la crise. Une des mesures
complémentaires urgentes pour éviter de voir de nouvelles crises financières
éclater est de socialiser le secteur bancaire.
Notes
|1|
Voir « Leur crise, 5 ans
après... », septembre 2013.
|2|
Voir « l’État a payé trop cher pour Belfius » de l’Echo du 30 janvier
2014.
|3|
Voir le dossier « Inside Fortis » de l’Echo du 19 septembre 2013.
|4|
19,2 milliards en prises de participation dans le capital et 13,4 milliards par
l’octroi de prêts, dont plus au moins 1/5e a été financé par les Régions.
|5|
Pour plus de détails, lire « Sauvetages ou
naufrages bancaires en Belgique ? », août 2013.
|6|
Ruzié David, Droit international public, 17e édition, Dalloz, 2004, p. 93.
|7|
À ce sujet, voir la campagne « Scindons les banques » sur www.scinderlesbanques.be/ ou encore
la vidéo de Finance Watch "Pourquoi séparer les
activités bancaires ?"
|8|
Même s’il ne s’agit pas de modèles parfaits à suivre, d’autres manières de
sauver les banques et l’épargne des citoyens ont été développées en Islande
récemment ou dans la Finlande, Norvège et Suède des années 1990. Pour plus de
détails, lire « Et si nous laissions les banques faire
faillite ? » de Xavier Dupret, août 2012.
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