vendredi 9 mai 2014

Le Pays de Canaan au XXIème siècle



Voila donc, un récit romantique de la vision qu'un homme honnête devrait avoir pour reconnaitre, sans parler de droit international, ce que c'est la justice. Ce droit qu'a tout homme de résider sur la terre où il est né. On ne parle pas ici de mondialisation, ni de droit économique ou politique, mais de droits humains, de ce droit qui équivaut à la justice. Pas un règlement semblant de justice, international ou pas, qui trouve sa justification dans un chantage que l'influence idéologique d'une secte à permis, le sionisme pour le pas le nommer, de tromper son monde sur l'injustice commise aux Juifs en Europe, réclamant sur des mensonges historiques, ethniques et religieux une terre qui ne leur a jamais appartenu, ni il y a 6.000 ans, ni aujourd'hui. Ce récit exemplairement bien écrit, sans haine et sans complaisance, devrait faire comprendre à tout homme honnête, c'est à dire quelqu'un qui intègre dans son mode de vie: "que sa liberté s'arrête l'à où celle de l'autre commence". Qu'il ne fasse pas appel aux mythes ou a de multiples artifices pour faire reculer les libertés humaines.
Le sionisme, je le crie tout haut, a trompé son monde sur tous les points ce sont des criminels qui ont compris la faiblesse et la cupidité de l'homme, là est leur seule et principale victoire. Le jour viendra où ils devront rendre des comptes...


8 Mars 2013, 02:08am
Publié par Adel TAAMALLI
La Terre Sainte, objet de convoitises multiples depuis plus de 3000 ans, s’est offerte à mes yeux le temps d’un voyage d’une semaine(1). Les images qui s’y sont incrustées pour toujours et à jamais, bien plus qu’ « émerveillantes », ont accru en moi une vision observatrice du monde, faisant, je l’espère, de cette chronique « Acontretouristique(2) » qui en est le résultat direct, un monument à la gloire de la Vérité que doit toujours, me semble-t-il, dénicher le voyageur lorsqu’il tente de capter la réalité du pays, de la région, de la ville qu’il visite.
Des conceptions définitives, des idées reçues ou même des témoignages de foi religieuse, je préviens le lecteur, il y en aura dans ce texte. De nombreux questionnements resteront tout de même sans réponses apparentes, ajoutant au reflet contrasté que projette ce pays, bien plus complexe qu’on ne le pense de l’extérieur, et ce, malgré son actualité simplificatrice, qui reste l’une des plus bruyantes et brûlantes du monde.
Et puis il y a Jérusalem, ville à laquelle une large part de cet écrit sera consacré, car si pour Montesquieu c’est Paris qui fit la France, il est clair que la capitale revendiquée à la fois par Israël et la Palestine fut, est et sera le point d’abscisse de l’Histoire de cette région, pour les raisons connues de tous, cette ville étant en effet trois fois sainte.
Enfin, je tiens à signaler ici qu’inhabituellement, parce que touché au plus haut point par cette destination, j’ai privilégié la narration à la première personne, afin de rendre compte de la manière la plus fidèle possible ce que j’y ai vécu. Une expérience formidable et fantastique en tout point de vue…



Le pays de Canaan n'a pas de frontières bien nettes que les peuplades cananéennes n'ont de caractère ethnique bien défini.
A vrai dire, la totalité de ce territoire ne sera jamais occupé pacifiquement par le peuple "élu". Des peuplades diverses, plus ou moins assimilées aux tribus cohabiteront avec les juifs, jusqu'à ce que la dernière venue, celle des Philistins, unifie le territoire.


Fragment de socle de statue mentionnant
vraisemblablement le nom d'Israël.
(biblearchaeology.org)
Lorsque des archéologues, qui sont je vous le rappelle des chercheurs, des universitaires, normalement dignes de confiance et au dessus de tout soupçon, cherchent à démontrer l'histoire, c'est à dire la "vérité" en la faisant précéder du vocable : vraisemblablement "nous pensons qu'éventuellement le mot "Israël" figure sur un socle. Je dis que ces universitaires là sont des escrocs, et comme le disait Coluche : "quand on en sait pas plus que ça, on ferme sa gueule".



Et les affirmations, la plupart du temps faites par des juifs, sur Internet concernant l'exclusivité juive de la Palestine sont mensongères au mieux apocryphes. [sur un fond d'histoire réelle, les digression sont si nombreuses et féeriques, en un mot mythiques, qu'elles ont enlevée l’authenticité, toute loyauté]   J'ai du moi même du corriger des affirmations sur l'origine du nom de "Monjuic" à Barcelone que des manipulateurs attribuaient aux juifs. Sans compter la trahison faite à Antoni Gaudi (concepteur de la "Sagrade Famila" à Barcelone consacré à la Sainte famille) et où des prénoms Juifs -pour une question d'argent- sont venus orner le fronton.

Soutenir le peuple palestiniens ne suffit plus, il faut dénoncer les crimes que le sionisme commet en Palestine, cautionnés par une majorité de juifs à travers le monde. Je disais il ne suffit plus de soutenir la Palestine,  en effet: pour annihiler ce soutien, ces juifs (favorables à Israël) doivent phagocyter toute émergence de ce soutient y compris contre leurs propres populations. Élire un juif à des responsabilités dans nos États, c'est prendre le risque, non seulement qu'il favorise Israël, mais qu'il agisse contre nous, contre les intérêts de la nation qui l'à élu...    
 

Une extraction de la politique impossible
« J’affirme haut et fort que le sionisme est une colonisation de type occidental bafouant les droits à l'autodétermination des Palestiniens, à qui revient toute cette terre ! Eux seuls ont le droit de dire si la Palestine devrait être un Etat binational ou dominé par eux seuls. Vive la Palestine, nation arabe et musulmane ! ». Voici les mots qui ont été miens à la sortie de ce voyage si éprouvant nerveusement parlant, mais riche tout de même d’enseignements profonds.

Impossible, en effet, l’a été dès le départ pour moi le fait de goûter à l’observation du pays par un autre prisme que celui relevant du politique. Des gens étaient attablés à une terrasse en train de deviser tranquillement aux pieds d’un des gratte-ciel de Tel-Aviv, et je ne les considérais que comme les descendants des fondateurs de l’Etat d’Israël qui n’a dû sa naissance qu’à la prise violente de terres à des Arabes palestiniens. Et si des gens « basanés » étaient accoudés à une jolie corniche de Jaffa donnant droit, plus au Sud, de l’autre côté d’un « mini-golfe maritime », sur la ville de Tel-Aviv, je ne pensais alors remarquer chez eux que de la tristesse dans leur regard, face au résultat concret et physique de l’injustice vécue par leurs aïeux suite à l’insertion dans ce coin du monde de la réalité sioniste contemporaine. Je m’amusais même à comparer l’architecture de Tel-Aviv, ville de gratte-ciel fade fondée par les Juifs autour de 1900, avec celle de Jaffa qui, elle, prétendait à des siècles d’histoire, et que je surnommais intérieurement et affectueusement l’Arabe car j’en admirais l’architecture de pierres anciennes. Même rénovées en effet, elles donnaient un cachet d’antan à cette colline enserrée de murailles qui dominait l’un des plus anciens ports du monde. Et je m’en réjouissais car je l’opposais, avantageusement pour elle, à Tel-Aviv, ville sans saveur selon moi.
Cet état d’esprit, je le devais principalement à mon origine, arabe d’Afrique du Nord, impulsant une proximité naturelle que je ressentais (et que je ressens toujours) avec les Palestiniens. Il fut pourtant à l’origine d’une quasi paranoïa, suite d’une intériorisation inconsciente maximale de ce que je percevais être la réalité du « peuple autochtone ». Je me sentais alors, comme lui, surveillé, épié, et ce, dans mes moindres gestes. Qu’un garçon d’hôtel vienne me servir le pot de bienvenue commandé par la Convention du tourisme israélien à laquelle j’avais été invité en tant que professionnel du tourisme et cela m’évoquait, tout de go, le Mossad. J’interprétais le fait que deux personnes israéliennes fussent continuellement avec notre groupe de quelques Français (cinq tout au plus) comme une tentative de briser mon éventuelle envie, habituelle, de liberté intégrale de mouvement, alors que les groupes de Sud-Coréens, de Brésiliens ou d’Américains, qui remplissaient, pour chacune de ces nationalités, un bus d'une cinquantaine de sièges, n’avaient continuellement qu’un seul chaperon. J’allais même parfois jusqu’à penser que le chauffeur de notre mini van, un Arabe israélien, avec lequel je me suis instantanément lié d’amitié grâce à l’utilisation commune de la langue arabe, n’était en réalité qu’un agent double à la solde du l’ « entité sioniste » (c’est comme cela que je qualifiais Israël dans ma solitude paranoïaque).
Cette psychologie particulière atteignit un paroxysme lorsque le religieux se mêla à la partie pour donner un cocktail qui, au final, heureusement, s’avéra bien plus étonnant que détonnant.
Des signes avant-coureurs du syndrome de Jérusalem et l’antidote politique
Depuis toujours, l’Homme s’est évertué à conter le récit de ses voyages faits d’exploration et de découverte. Celui qui a le plus compté dans l’obsession que j’ai aujourd’hui de recueillir mes escapades fut rédigé par Stendhal pour décrire un syndrome qui l’habita lorsqu’il se rendit en Toscane et qui porte aujourd’hui son nom : le syndrome de Stendhal. Il s’agit d’un état frisant la folie et né d’une sorte de stupeur à la découverte d’œuvres d’art marquantes. Il existe un autre de ces fameux états maladifs, le syndrome de Jérusalem, à la base aujourd’hui de toute une littérature savante de spécialistes. Depuis des siècles, beaucoup de visiteurs de Jérusalem sont en effet habités par une vision religieuse, les faisant se prendre pour le Messie, ou bien pour des annonciateurs de la Fin des Temps, état que l’on qualifie de maladie psychiatrique. Et aujourd’hui encore, le débat sur la cause de cette mystérieuse maladie reste entièrement ouvert entre ceux qui affirment que les personnes atteintes portaient déjà en elles les symptômes bien avant leur venue et les défenseurs de la thèse adverse, faisant état de la spécificité de Jérusalem quant à la cause de l’apparition de ce mal dont on ne peut, effectivement, souffrir ailleurs.
Influencé par les écrits sur ce sujet que j’ai pu consulter avant mon arrivée à Jérusalem, j’ai ressenti comme un mal-être, une peur de la découverte de la ville trois fois sainte, et ce, dès le deuxième jour de mon voyage, alors que je n’en étais encore qu'à trois de sa découverte. J’étais effrayé à l’idée de souffrir de ce syndrome, et de ne plus jamais en sortir. Et je le dis, sans honte et sans vouloir non plus décrédibiliser cet écrit, j’ai cru même avoir des visions étranges lors de certaines de mes somnolences.
A Tel Aviv et à Jaffa, j’ai combattu ce mauvais sentiment en lui fermant la porte de mon esprit, occupé qu’il était par l’Histoire. De même à Césarée, site archéologique cumulant des restes de plusieurs époques, allant des Romains aux Ottomans, en passant par les Byzantins, et où je me suis voulu admirateur des mosaïques qui nous sont parvenues et qui sont datées de plus d’un millénaire. A Haïfa, ville par ailleurs centre du bahaïsme (secte devenue religion qui s’est détachée de l’Islam tout comme les musulmans l’ont considérée comme ne faisant plus partie de leur groupe), je n’osais pourtant rentrer dans une église où une célébration faite de chants religieux était donnée, car je me sentais à ce moment précis presqu’attaqué de toutes parts. J’ai vraiment eu peur à cet instant-là, plus que jamais dans aucun de mes voyages, parce que c’est la première fois que je pensais pouvoir être attint de folie lors d’une de mes pérégrinations.
Toutefois, j’ai eu la chance de pouvoir me rendre compte que j’avais le loisir de commencer à avancer mes convictions politiques devant un des membres israéliens de la Convention, malgré les quelques précautions de langage qu’il fallait, il me semblait, toujours prendre. Il s’agissait de la défense, maladroite car pas tout à fait franche, je le concède, du droit des Palestiniens d’avoir un Etat reconnu à l’Assemblée générale de l’ONU, chose qui avait justement eu lieu la veille.
J’ai ainsi pu reprendre le dessus sur moi-même et profiter pleinement d’une démonstration faite dans un kibboutz israélien du Nord du pays qui s’évertuait à présenter de façon plutôt humoristique, et donc intéressante, la vie quotidienne des Juifs des Temps bibliques (nourriture, élevage, agriculture, déguisement d’époque que tous devaient porter). Je remarquai, par ailleurs, sur les bords du lac de Tibériade dans la ville éponyme, une mosquée désaffectée qui faisait initialement partie de l’ancienne muraille de la cité et je m’en émus. Je finissais enfin par critiquer ouvertement le fait que nous étions transportés, pour y passer la soirée, vers le Golan syrien, illégalement annexé par Israël malgré la non-reconnaissance de la « Communauté internationale », France la première (3). 
La politique m’a sauvé, pourrait-on dire. En tout cas, elle a éliminé en moi toute peur de la rencontre de Jérusalem. Au contraire, mon impatience n’en devenait que plus grande. Puis la religion a fait le reste. Je n’en devenais que plus léger. Car je ne pouvais que m’extasier à l’idée que moi, musulman, j’allais pénétrer dans le troisième Lieu Saint de l’Islam, à al-Qods (nom arabe de Jérusalem, signifiant la Sainte). Que je poserai, lors d’une prière, mon front sur le tapis du Dôme du Rocher. Que j’allais m’asseoir dans la mosquée al-Aqsa pour méditer un instant. Bref, que je toucherai au Saint des Saints, certes, mais dans une logique musulmane, celle qui m’a le plus motivé, d’emblée, dès que l’idée de la faisabilité de ce voyage est apparue dans ma vie, pourtant habituellement si banale et lambda entre toutes.

Entre Nazareth et Bethléem, une Ville, Jérusalem
Mais avant cela, comme pour Jésus, la direction vers Jérusalem m’imposait une halte à Nazareth. Et quelle ne fut ma surprise heureuse de voir une ville arabe dans le plein sens du terme, avec son souk, son marché, son appel à la prière, ses femmes voilées, ses écritures arabes écrits en gros sur des affiches, sans être associées à l’hébreu comme ce fut auparavant partout le cas sur les panneaux routiers du pays.
Bien sûr, en tant que ville du Messie, des édifices religieux chrétiens y ont été érigés, dont le plus fameux d’entre eux, la basilique de l’Annonciation, magnifique et magistrale. Mais c’est bien de Nazareth que je date mon élévation définitive sur le plan spirituel et intellectuel pendant ce voyage. D’un état de délabrement moral qui se ressentait, j’en suis sûr, physiquement, je parvins alors à une sorte de joie non feinte et pleine de vie, avec en toile de fond la Ville, al-Qods, Jérusalem, qui restait toujours à découvrir, chose dont j’étais littéralement impatient.
Et j’ai été servi dès le départ. A peine mon arrivée faite et mon installation à l’hôtel effectuée que j’accourais, mon cerveau empli d’excitation, en direction de la Vieille Ville. Pour ce faire, il fallait emprunter le tramway de la polémique, celui construit par une société française de renom pour le compte de la municipalité hiérosolymitaine (3). La controverse ? Ses rames permettent la jonction entre les colonies juives de Jérusalem-Est d’une part, appartenant à la Palestine selon la Communauté internationale et capitale du futur Etat palestinien selon l’unanimité de ses défenseurs, et la partie ouest de la ville d’autre part, entièrement juive. Cependant, je dois dire que, même si je suis totalement en faveur de la création d’une Palestine indépendante et contre le fait que Jérusalem soit la capitale « éternelle et indivisible » d’Israël (proclamée comme telle par la Knesset -l’assemblée israélienne- en 1981), je souhaite témoigner ici du fait que cette infrastructure de transport permet le côtoiement des Israéliens avec des Arabes de l’Est qui se rendent à l’Ouest pour y travailler. Une situation toutefois pleine de retenue mais qui, peut-être et avec d’autres, changera les idées et, progressivement, amènera la paix.
Ah al-Qods ! Elle me fit tout oublier. La politique, le mal-être psychologique, les doutes, l’injustice scandaleuse, tous ces sentiments sont passés à la trappe et ont laissé la place à l’émerveillement. Allais-je vraiment me laisser éblouir par l’éclat du toit d’or du Dôme du Rocher ?
Mais oui ! C’est véridique !!!! Je passe la Porte de Damas, le plus important des accès à la Vieille ville, grâce à un pont surplombant un fossé et sur lequel s’étire de part et d’autre, déjà, un marché authentique de fruits et légumes et de vêtements dont les étals sont tenus par des Arabes. Cet accès fait face à une gare routière qui sert de centre de redistribution à toute une flopée de bus anciens. Le côté vieillot de ces moyens de transport, associé à la pierre blanche si particulière de la Muraille de la Vieille ville et des bâtiments du quartier populaire qui fait face à la Porte de Damas, me donne l’impression de me retrouver dans l’un des centres de l’Empire colonial britannique triomphant, en plein dans les années 1930. Il ne manque plus que le campement de bédouins, qui seraient venus ici se réapprovisionner pour la saison et échanger leurs produits avant de repartir dans leur désert, sans rien changer à leur mode de vie ancestral malgré la marche évolutive du monde environnant, parfois révolutionnaire.
Le but recherché ? L’esplanade des Mosquées bien sûr. Il fallait donc se faufiler, parmi les nombreux badauds, dans des petites ruelles de type médiéval. Une foultitude s’y engouffre le jour et s’y affaire afin d’y acheter les produits recherchés : épices, fruits et légumes, vêtements…avant de se rendre dans le lieu saint y prier. C’est l’un des deux quartiers arabes de la Vieille Ville, dans lequel, parfois, mais rarement, on rencontre des Juifs habillés à la mode hassidique se rendre, on le devine, au Mur des Lamentations. Or celui-ci n’est autre chose qu’une des parties de l’enceinte enserrant le Noble Sanctuaire. Le but avoué se rapproche-t-il donc enfin ? Le doute s’installant sur la bonne direction à prendre, il faut demander à l’un des passants son chemin. La connaissance de l’arabe aidant, je comprends que je dois continuer tout droit et tourner à la première à gauche, tout en me gardant de ne pas m’éloigner des pêchés selon les dires de ce vieil homme. Me laissant à sourire à sa remarque pleine de sagesse, je manque de me faire percuter par un engin étrange, adapté à l’étroitesse extrême de certaines des ruelles de la Vieille ville et qui sert au réapprovisionnement des échoppes et des habitants du quartier et à l’évacuation des déchets grâce à sa grande petitesse et à la maniabilité étonnante de ses roues. Il est 17h00 environ et la fin de la journée sonne le glas, tout doucement, de la rumeur habituellement bruyante de la masse grouillante des personnes se déployant partout dans le quartier, qui se vide. Chose étrange que d’approcher l’un des lieux les plus reconnaissables de la Terre et ne rencontrer, d’un coup, plus personne.
Sauf au point d’entrée que j’atteignis enfin, qui est surveillé par des hommes en uniforme, des Jordaniens, le royaume hachémite jouissant de la garde de l’esplanade. Après m’être fait interroger sur ma qualité d’adepte de l’islam, je pus enfin pénétrer le large espace et me laisser remplir d’émotion joyeuse à l’idée que je pus, pour la première fois de ma vie, pénétrer un lieu saint d’une des grandes religions de ce monde, la mienne. Le Dôme du Rocher brillait d’une lumière éclatante malgré le soleil couchant et l’extase me gagnait à l’idée d’entrer dans le Saint des Saint pour les Juifs, l’endroit sur Terre à partir duquel le prophète de l’islam entreprit son Ascension vers les cieux et au cours duquel il reçut l’ordre de Dieu Lui-même de commander au croyant les cinq prières quotidiennes qui, avec tant d’autres aspects, font la saveur de la religion musulmane.
Mais très vite, après avoir prié d’une foi fervente, je fis face à la banalité (dans le bon sens du terme) du lieu pour les Palestiniens : on pouvait y voir des enfants jouant au football et matérialiser les buts en se servant d’un des nombreux mihrabs posés ici en plein air dans le large espace, ou bien entendre une maîtresse grondant le cancre de sa classe dans une des sorties qu’elle était sans doute accoutumée à organiser ici ; des femmes devisaient dans la mosquée al-Aqsa qui, bien que ne présentant pas une architecture extérieure flamboyante, cache en son sein un intérieur magnifiquement grandiose, et des hommes patientaient entre deux prières dans un des recoins de la grande cour, une cigarette à la main. C’est qu’en plus d’être le troisième Lieu Saint de l’Islam, le sanctuaire est aussi un espace de vie pour les Palestiniens qui semblent y respirer l’air de la liberté, enfermés qu’ils sont par les hauts et larges murs du l’esplanade qui les éloignent, un cours moment, de la situation politique exécrable dans laquelle ils se trouvent au dehors. Enfin pour ceux qui habitent à proximité car pour les Arabes des quartiers excentrés de Jérusalem-Est, il faut partir tôt pour pouvoir attraper à temps un des bus de la ville et gagner le foyer.
Après près de deux heures passées ici, j’eus l’envie brusque de me rendre au Mur des Lamentations, bien que je prévoyais cela pour le lendemain. Il fallait le visiter ce lieu le plus saint du judaïsme, qui ne se trouvait qu’à quelques encablures du Dôme du Rocher. Quel sentiment ineffable me toucha lorsque je l’aperçus enfin, après avoir passé le contrôle de sécurité (dont un détecteur de métal), ce fameux Mur occidental ? Je ne le sais toujours pas. Mais je suis sûr d’avoir été frappé par la torpeur silencieuse qui régnait devant cet endroit. Un monument qui, bien que reconnaissable, dépayse fortement. Les lettres laissées par les croyants dans les interstices de l’édifice, le va-et-vient incessant impulsé à leur corps par des pieux juifs, les kippas que l’on distribuait à toute personne qui voulait s’en approchait, tout cela donnait à réflexion et à admiration. La passerelle des Maghrébins qui s’enfilait au dessus des têtes pour permettre l’accès des touristes à l’esplanade tous les jours le matin (sauf le vendredi), quelle situation rapprochée entre deux religions qui ont l’air si antagoniques l’une vis-à-vis de l’autre ! Ces quelques minutes passées là-bas , je voulais les prolonger afin de m’habiter du respect que je voulais garder pour cette vieille religion, nonobstant le fait que le Mur est une partie du problème insoluble du conflit, qu’il est pour les Juifs le lieu le plus proche du Saint des Saints (aujourd’hui abrité par le Dôme du Rocher, cœur de l’esplanade des Mosquées) et qu’il a été dégagé en 1967 à la suite de la destruction de maisons palestiniennes après la conquête à l’issue victorieuse, pour les Israéliens, de la Guerre des Six-Jours. Est-ce vrai que l’édifice mural recevait, par haine, les excréments des Arabes avant cette date ? Toujours est-il que de tout cela, je ne voulais, à cet instant précis, corrompre mon esprit afin de saluer une des grandes religions de ce monde, le judaïsme.
Ah Jérusalem !, ville de la polémique depuis les siècles des siècles. L’une d’entre elles fut vivace pour moi lorsque le maire de Jérusalem prit la parole en anglais lors d’un discours à l’occasion de la cérémonie de clôture de la Convention du tourisme, le lendemain de cette première découverte. C’était dans les caves de Zedekiah, grottes creusées en dessous de la Vieille Ville, tenues fermement par les Israéliens et qui rapprochent le visiteur du Saint des Saints, révéré par les Juifs. Dans un anglais clair et limpide, et selon un plan concis et équilibré, ici en plein Jérusalem-Est qui appartient selon la Communauté internationale à la Palestine, le premier édile énuméra les conséquences bénéfiques pour la paix du rôle joué par Jérusalem en tant que « capitale réunifiée ». Un message politique donnée à une assistance composée de professionnels du tourisme, voilà ce que cela était, sans aucun doute possible ! Le tourisme comme vecteur d’une idéologie étatique politique, un but inavoué ?
Le lendemain, je me rendais à Bethléem, située dans la banlieue de Jérusalem, de l’autre côté du mur (de séparation). Et je pus voir comment la capitale réunifiée fut oublieuse de sa banlieue dont elle lui a volé des terres (le tracé du mur intègre du côté « protégé » le site du tombeau de Rachel qui fait officiellement partie des Territoires occupées). On y accède après le passage humiliant par un check-point tenu par des jeunes soldat(e)s israélien(ne)s et qui n’autorise l’entrée sur le territoire israélien qu’à une petite minorité de Palestiniens de Bethléem. On y retire dans les guichets automatiques de banque, au choix, des shekels ou des dollars, monnaies officielles des deux Etats les plus impliqués dans la lutte contre la reconnaissance de la Palestine par l’UNESCO puis par l’ONU. Mais il faut dire que l’on y trouve une vie palestinienne quasi complète, avec un drapeau, des institutions, des policiers, des parkings payants, un souk, des boutiques et une vie de tous les jours que l’on peut observer. Sans oublier l’église de la Nativité, trésor de la ville à qui elle doit, somme toute, le fait de connaître un des meilleurs niveaux de vie chez les Palestiniens, tout en restant bien loin derrière les standards israéliens.

Pour finir, j’aimerais livrer au lecteur quelques anecdotes saillantes, afin de le confronter encore plus à la complexité du pays :
A Tel-Aviv, on trouve, jeté à l’envi dans les rues, des petites vignettes présentant des call-girls en petite tenue, avec numéro de téléphone
A Jaffa, un restaurant au cadre charmant offre une cuisine tunisienne authentique, dont la fameuse ojja pour les connaisseurs (qui est une sauce piquante à base d’œufs)
A Haïfa, quelques épiceries de nuit sont tenues par des Arabes israéliens
Lorsqu’on fait une balade à bateau sur le lac de Tibériade, une ribambelle de mouettes suit les engins dans l’attente qu’on lui jette des morceaux de pain, que ses membres rattrapent à la volée avec une souplesse effarante. Pendant ce temps-là, des corbeaux noirs tiennent le piquet sur des troncs de bois posés à la verticale sur le fond du lac, sans se soucier le moins du monde de cette agitation
Au bord du Jourdain, un établissement étrange, créé par les Israéliens, à des fins purement touristiques et donc mercantiles : une berge au bord du fleuve, avec accès facilité pour toucher ou s’immerger dans l’eau, afin de suivre les pas de Jésus lors de son baptême par Jean-Baptiste. Sauf que l’on pense que cet épisode biblique a eu lieu beaucoup plus au Sud
A Nazareth, des grosses affiches présentent en arabe et en anglais des versets du Coran sur la nature non filiale du Christ vis-à-vis du Seigneur. En second plan, derrière ces calicots, on aperçoit le gigantesque dôme de l’Eglise de l’Annonciation, où a été révélée à Marie la grossesse miraculeuse de celui qui est, pour une grande partie des chrétiens, le Fils de Dieu
A Jérusalem, dans le quartier arabe de la Vieille ville, on peut voir des dessins du drapeau palestinien et des slogans politiques pour la libération du peuple palestinien. Personne ne sera surpris à l’idée que le vert, le rouge et le noir sont allègrement utilisés dans l’écriture de ces tags

Je souhaiterai enfin rendre hommage, sans les nommer, à un certain nombre de personnes rencontrées lors de ce périple : un membre juif et israélien de la Convention qui, bien que je n’étais pas d’accord avec ses idées, accepta le débat sans hypocrisie, ce dont je l’en remercie ; notre chauffeur, un Arabe israélien m’apportant de riches enseignements sur la complexité de la vie dans ce pays ; les autres Français qui m’ont accompagné durant tout le circuit ; notre guide franco-israélien qui, malgré la virulence de ses conceptions politiques que j’ai essayé d’affronter, possédait un humour que j’ai aimé goûter ; la femme de ménage arabe d’un des hôtels où j’ai séjourné ; la cuisinière qui préparait le pain pendant un de nos repas, pain qui ressemblait à celui de ma mère ; l’homme avec qui j’ai discuté dans l’esplanade des Mosquées ; l’Israélien qui m’a guidé, en français, vers le Mur des Lamentations ; le Palestinien, francophone lui aussi, qui m'a accueilli à Béthléem et m'a fait l'honneur d'une visite guidée privée de l'église de la Nativité ; l'Israélienne, professionnelle du tourisme et fervente supportrice de l'égalité de traitement envers tous, Juifs ou Arabes ; … et beaucoup d’autres.

(1) L’Office de tourisme d’Israël m’a en effet invité pour cet éductour. Un éductour est, dans le monde professionnel du tourisme, un voyage organisé par les pouvoirs publics en charge du secteur dans le but d’accroître le nombre d’entrées touristiques dans le pays. J’ai participé à cela en tant que membre d’un tour opérateur, Idée Nomade, comme beaucoup d’autres centaines de professionnels venant du monde entier et invités comme moi à cette « Convention internationale du tourisme en Israël ». Ce circuit d’une durée de six jours me conduira, dans l’ordre d’arrivée, à Tel-Aviv, Jaffa, Césarée, Haïfa, la campagne du Nord d’Israël, Tibériade, le Golan, les bords du Jourdain, Nazareth, Jérusalem et, de l’autre côté du Mur, dans les territoires occupés, Bethléem.
(2) Une chronique « à-contre-touristique », dans la terminologie que j’ai créée, signifie qu’il s’agit d’un compte rendu d’un de mes séjours relatant, sur la destination visitée des faits, des sentiments, une vision…que l’on trouve rarement ailleurs dans ce genre littéraire.
(3) Voir pour cela le lien Internet suivant, http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs/conseils-par-pays/israel-territoires-palestiniens-12265, dont la page présente les conseils aux voyageurs du Ministère des Affaires étrangères pour les touristes français se rendant en Israël et dans les Territoires occupés. On y voit, sur la carte publiée, que le Golan est considéré comme faisant partie de la Syrie, et non du foyer juif.

mardi 6 mai 2014

Israël-Palestine : une « crise » qui vient de loin



Ce "post" retrace brièvement mais sans ambigüité la réalité des négociations, que nous pouvons qualifier sans ambages de: Farces.
Nous ne devons pas oublier cependant qu'en même temps que se déroulent ces négociations/farces, des crimes contre ces mêmes palestiniens, à qui l'on fait (les israéliens) entrevoir un possible règlement où le Droit international serait respecté, sont commis tous les jours à leur encontre. Des crimes se tous ordres, harcèlement quotidien, assassinat, sans oublier les démolitions de leurs maisons (sous des arguments à assommer un bœuf tant l'hypocrisie y règne), l'incendie des oliveraies par les colons protégés par l'armée ou encore et je m'arrêterais là, la spoliation des terres, des biens... Tous les hommes attachées au à la justice se posent la question de savoir si l'histoire mouvementé des juifs ne tient pas précisément à un comportement reçu en héritage ?  
       



Crédit Photo: DR

 « Israël suspend sa participation au processus de paix». Au cours des derniers jours, ce titre a fait la une de nombreux médias, mais la majorité des observateurs ne semblent pas se poser une question pourtant essentielle: de quel «processus de paix» parle-t-on?
Il est en effet particulièrement affligeant de constater que, malgré les évidences, nombreux sont ceux qui continuent d’alimenter la fable du «processus négocié», s’interrogeant sur les responsabilités des uns et des autres dans son «interruption».

Un «processus de paix»?
Voilà désormais plus de vingt ans que l’enfumage du «processus de paix» se poursuit, avec son cortège de formules passe-partout, de la «reprise des négociations» aux «concessions douloureuses» en passant par les «responsabilités partagées» et les «extrémistes qui sabotent la paix». Durant ces vingt ans, des centaines de check-points ont été établis dans les territoires palestiniens, des murs ont été construits, la colonisation s’est poursuivie sans discontinuer, à un point tel que l’emprise israélienne sur les territoires occupés n’a jamais été aussi forte qu’elle ne l’est aujourd’hui. Il n’y a pas eu de «processus de paix» mais un processus de réorganisation de l’occupation, Israël faisant semblant de concéder une autonomie virtuelle aux Palestiniens tout en accentuant son contrôle réel sur la Palestine.
Ces vingt années ont certes été scandées de «moments de tension» et de «moments de calme», de «rupture du dialogue» et de «reprise du dialogue». Mais la logique d’ensemble a toujours été la même: des «négociations» sans fin, durant lesquelles Israël modifie et accroît sans cesse ses exigences, tout en poursuivant sa politique coloniale et en rendant les Palestiniens responsables de leur sort. Un chiffre récent, parmi tant d’autres, illustre cette réalité selon laquelle les «négociations» servent à dissimuler la réalité de l’entreprise coloniale israélienne: alors que les rencontres entre représentants israéliens et Palestiniens ont repris en 2013, la colonisation s’est dans le même temps accrue, avec une augmentation de 123%, par rapport à 2012, du nombre de mises en chantier dans les colonies israéliennes de Cisjordanie...

Réconciliation palestinienne?
Loin de favoriser les Palestiniens ou d’équilibrer le rapport de forces en leur faveur, les prétendues «négociations» servent en réalité les objectifs israéliens, en maintenant l’illusion d’un compromis possible entre le faible et le fort, avec pour arbitre les États-Unis, soit l’entraîneur de l’une des deux équipes.
Une illusion largement entretenue par une partie de la direction palestinienne, aujourd’hui regroupée autour de Mahmoud Abbas, qui a fait le choix de sacrifier les intérêts du peuple palestinien pour bénéficier de gratifications matérielles et symboliques accordées au compte-gouttes par l’occupant et ses alliés. Une illusion qui n’illusionne plus personne en Palestine aujourd’hui, y compris au sein de cette direction, qui cherche désormais par tous les moyens à apparaître comme celui qui refuse de capituler totalement face à Israël, tout en essayant de maintenir en vie un «processus» dont elle est devenue dépendante.
C’est paradoxalement dans ce cadre qu’il faut analyser la «réconciliation» palestinienne actée le 23 avril dernier par un accord entre l’OLP et le Hamas, qui prévoit la formation d’un gouvernement d’union nationale et l’organisation d’élections dans les territoires occupés. L’accord, signé par un Hamas en quête d’un nouveau souffle en raison de son isolement lié au blocus de Gaza, au putsch contre les Frères musulmans en Égypte et à l’affaiblissement diplomatique de son allié qatari, demeure certes flou sur nombre de questions essentielles et l’on ne peut qu’être sceptique quant à sa mise en application. Mais il pourrait toutefois conférer une légitimité nouvelle à un Mahmoud Abbas, largement décrié dans les territoires palestiniens en raison de sa stratégie uniquement axée sur les négociations, en «mouillant» le Hamas et en lui faisant porter la responsabilité d’une éventuelle rupture en cas de reprise du «processus».
Car la question des relations avec le Hamas est à appréhender comme un élément du rapport de forces dans les relations de Mahmoud Abbas avec le gouvernement israélien, un divorce avec le mouvement islamique pouvant facilement apparaître, dans un avenir proche, comme une concession exigeant des contreparties israéliennes. En d’autres termes, la crise n’est pas finie.

Julien Salingue