jeudi 14 octobre 2010

Une résistance sans leadership politique

Une résistance sans leadership politique :
Monique Etienne

Dans les villages, des îlots de résistance se mettent en place. Les femmes, les agriculteurs s’organisent. Le Programme de développement des coopératives d’huile d’olive prend de l’am- pleur et rassemble toujours plus d’oléiculteurs motivés. Des solidarités se poursuivent contre le mur. A Qaffin, dans la région de Tulkarem, début février, les anti-colonialistes israéliens sont venus aider les villageois à replanter 1 500 oliviers de l’autre côté du mur. Bil’in est un modèle de résistance locale réussie qui n’arrive malheureusement pas à impulser une mobilisation nationale.
Car c’est là que la politique israélienne à marqué des points : ces mouvements de résistance demeurent éclatés. La société palestinienne est plus atomisée que jamais. Pire : il existe une cassure entre le mouvement national palestinien en crise et les mouvements de résistance.
Samia Bamya (ex-vice-ministre des Affaires étrangères et fondatrice de la Commission internationale des femmes pour une paix juste.) constate que : « Le mouvements national traverse la crise la plus grave depuis la création de l’OLP en 1965 qui à su préserver l’unité nationale des Palestiniens. Pour la première fois nous sommes bloqués. Les conditions subjectives au sein du mouvement national ne sont pas encore mûres pour proposer un programme alternatif crédible. Les forces dites « de gauche » n’ont rien à proposer. Elles ne savent qu’être contre et jouer au missionnaire entre le Fatah et Hamas. Et pendant ce temps, nous sommes en train de perdre des soutiens de la communauté internationale car l’histoire n’attend pas. »
Cette absence de perspectives rejaillit en boomerang sur le mouvement pour la paix en Israël et sur les mouvements de solidarité dans le monde. Il faut partir d’une évidence, explique Michel Warschawski : « il ne peut y avoir de mouvement israélien anti-guerre indépendamment de la Résistance Palestinienne. Notre mouvement qui était un mouvement de masse au moment de la guerre du Liban et pendant la première Intifada n’existe plus. Le mouvement a toujours fonctionné selon le principe de la petite roue entraînant la grande roue. Le noyau anti-colonia- liste, indépendant de la situation, est toujours mobilisé. Mais il n’y a plus de grande roue pour assurer le relais parce qu’il n’y a plus de mouvement profond de l’opinion israélienne. Il n’y a plus non plus de pressions internationales. »
Même si la crise politique du mouvement national palestinien est, surtout, le résultat du lâchage de l’Europe contribuant, en se ralliant au boycott israélien et américain, à l’affaiblissement de l’OLP et de Mahmoud Abbas et à la mort du processus d’Oslo, il n’empêche qu’elle pèse sur les capacités de mobilisation des mouvements de solidarité.
Samia Bamya pense que la période d’une Autorité palestinienne par intérim est arrivée à son terme. «  Le paradoxe vient du fait que L’Autorité Nationale palestinienne est traitée comme un Etat souverain… En principe nous avons une Autorité ; mais une fois que le robinet de l’aide internationale à été fermé, que la vallée du Jourdain est annexée, que le mur et les colonies ne finissent pas de s’étendre, que Jérusalem est ferme aux palestiniens : de quelle Autorité parle-t-on ? Est-ce que cette autorité a encore un sens pour le mouvement national palestinien ? Une question encore plus compliquée par la séparation entre Gaza et la Cisjordanie. 
Que faut-il faire ? Je ne sais pas. Quand on parle de nouvelles élections je souris… On va voter sous occupation contre la mauvaise gestion d’une Autorité palestinienne qui n’a jamais eu les moyens de sa politique. Les Palestiniens on voté Hamas pour le changement et les réformes. En quelques mois, Hamas a gâché ses cartes… La crise est complexe et nourrie par Israël et par la stupidité ou lâcheté de la communauté internationale. Hamas a été élu pour essayer une autre option. Les sanctions internationales et le boycott ont empêché l’opportunité qui nous offerte après les élections de révéler la vraie nature du Hamas en lui laissant gérer le pays. Cette politique a au contraire renforcé les radicaux du Hamas qui sont désormais ses seuls porte-parole. Alors aller aux urnes pour choisir quel programme ? 
Le programme du Hamas n’est pas nationaliste. Son objectif est de créer un Etat islamiste dans une petite partie de la Palestine libérée… Dans cette conjoncture mondiale marquée par la régression du rôle de l’Europe  la prédominance de Bush dans le contexte régional du projet de grand Moyen-Orient et de guerre de civilisation, seul le mouvement islamiste semble présenter une alternative de résistance à la soumission à l’impérialisme… Quel est l’autre choix ? Poursuivre les négociations ? Quels sont les résultats de la conférence d’Annapolis : les colonies continuent de s’agrandir, Jérusalem c’est pour plus tard. Les réfugiés n’en parlons plus ! Mais on nous donne 7 milliards de dollars pour une souveraineté qui n’existe pas. »


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