dimanche 12 mai 2013

LE NETTOYAGE ETHNIQUE DE LA PALESTINE Jaffa et de Tel-Aviv



Sur une population largement sans défense
Le Nettoyage continue :


Dès la fin mars, les opérations juives avaient détruit une grande partie de l’arrière-pays rural de Jaffa et de Tel-Aviv. Il y avait une division du travail évidente entre les forces de la Haganah et l’Irgoun. Tandis que la Haganah avançait en bon ordre d’un village au suivant conformément au plan, on laissait l’Irgoun mener des actions sporadiques dans les villages qui ne figuraient pas sur la liste initiale. C'est ainsi que l’Irgoun entra le 30 mars dans le village de Cheikh Muwanis (ou Munis, comme on l’appelle aujourd’hui) et en expulsa les habitants par la force. Aujourd’hui, ses ruines se trouvent sous l’élégant campus de l’université de Tel-Aviv,  et l’une des rares maisons restées debout sert de foyer aux enseignants.
Sans l’entente tacite entre la Haganah et l’Irgoun, Cheikh Muwanis aurait peut-être été sauvé. Les chefs du village avaient fait des efforts pour entretenir des rapports cordiaux avec la Haganah afin d’éviter l’expulsion, mais les « arabisants » qui avaient conclu ce traité étaient introuvables le jour ou l’Irgoun s’est présenté et a expulsé toute la population.
En avril les opérations dans les campagnes ont été étroitement liées à l’urbicide.
Ce sont  les villages proches des  entres urbains qui ont été pris et évacués, parfois avec des massacres, dans une campagne de terreur qui visait à préparer le terrain pour d’emparer plus facilement des villes.
Le conseil consultatif se réunit à nouveau le mercredi 7 avril 1948. Il décida de détruire, avec l’expulsion totale des habitants, tous les villages qui se trouvaient dur les routes Tel-Aviv-Haïfa, Djénine-Haïfa et Jérusalem-Jaffa. En définitive à l’exception d’une minuscule poignée de villages, aucun ne fut épargné.
Ainsi, tandis que l’Irgoun effaçait de la carte le village de Cheikh Muwannis, la Haganah occupa en l’espace d’une semaine six villages de la même zone : d’abord Khirbat Azzun, le 2 avril, puis Khirbat Lid, Arab al-Fuqara, Arab al-Nufay’at et Damira, qui avaient tous été nettoyés le 10, et enfin Cherqis, le 15. à la fin du mois, trois autres villages proches de Jaffa-Tel-Aviv   ̶  Khirbat al-Manshiva,
Biyar ‘Adas et le gros village de Miska   ̶  avaient été pris et détruits.
Tout cela eut lieu avant qu’un seul soldat des armées régulières arabes ne soit entrée en Palestine, et le rythme est ensuite devenu difficile à suivre, tant à l’époque que plus tard pour les historiens. Du 30 mars au 15 mai, 200 villages ont été occupés et leurs habitants expulsés. C’est un fait, à dire et à répéter, car il anéantit le mythe israélien selon lequel les « arabes » se seraient enfuis quand l’« invasion arabe » a commencé. Près de la moitié des villages arabes avaient déjà été attaqués quand les gouvernements arabes ont finalement décidé  ̶  à contrecœur, nous le savons  ̶   d’envoyer leurs troupes. Quatre-vingt-dix autres villages seraient rayés de la carte entre le 15 mai et le 11 juin 1948, date à laquelle la première des deux trêves entra enfin en vigueur.

Côté juif, les témoins oculaires se souviennent clairement d’avoir pensé tout au long du mois d’avril que l’armée pouvait faire plus. Dans son récent entretien avec les historiens officiels, Palti Sela, dont on peut trouver le témoignage dans les archives de la Haganah à Tel-Aviv, une d’un langage haut en couleur pour rendre le climat d’excès de zèle. Palti Sela était membre des forces juives qui ont occupé et nettoyé la ville de Baysan et reçu l’ordre de chasser les grandes tribus bédouines qui, depuis des siècles, passaient certaines saisons dans la région. Il dit par exemple :
Quand nous avons terminé de nettoyer la région  des tribus bédouines, le plus [il se sert ici du mot yiddish qui désigne une blessure purulente : farunkel] de Baysan était encore infecté par deux villages, Faruna et Samariya. [Leurs habitants] n’avaient pas l’air d’avoir peur, cultivaient encore leurs champs et continuaient à circuler sur les routes.

L’un des nombreux villages pris pendant ces attaques à l’est fut celui de Sirin. Son histoire résume le malheur qui c’est abattu sur des dizaines de villages dépeuplés par les forces juives dans le Marj Ibn Amir et la vallée de Baysan, où l’on cherche aujourd’hui en vain la moindre trace de la vie palestinienne qui y prospérait autrefois. 

Source :  ILAN PAPPE    Historien Israélien

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