lundi 20 mai 2013

LE NETTOYAGE ETHNIQUE DE LA PALESTINE Le Village de Serin



Sur une population largement sans défense



Le Village de Serin :
Ne cherchez pas des photos, elles n'existent plus...

Sirin à été occupé le 12 mai 1948, C'est un village pastoral qui se trouve près de Baysan, sur l’une des terres du Jiftiliq : historiquement, ces terres, parfois appelées terres « mudawar », appartenaient  nominalement au sultan ottoman, mais elles étaient cultivées par les paysans palestiniens. Sirin  avait grandi jusqu'a devenir un village prospère autour de la sépulture (maqam) d’un saint homme musulman nommé cheik Ibn Sirin.
Dans cette région de Palestine, le sol est rude et, l’été, la chaleur est insupportable. Pourtant, l’habitat qui s’y était développé autour du maqam ey de sources voisines, à trois kilomètres, ressemblait à celui de villages dotés d’un bien meilleur climat et d’une eau coulant en permanence. Les animaux apportaient l’eau des puits, et des paysans diligents s’en servaient pour transformer une terre âpre en un jardin d’Eden. Sirin était un village isolé car on ne pouvait y accéder en voiture, mais les étrangers qui s’y rendaient avaient remarqué le style particulier des bâtiments : ses maisons étaient construites en pierres volcaniques noires mêlées d’argile, et leur toits étaient recouverts de couches entrecroisées de bois et de bambou. Qirin était connu pour être un bel exemple du système collectif de partage des terres, auquel tenaient les villageois et qui remontait à la période ottomane. Dans ce village, il avait survécu tant à la capitalisation de l’agriculture locale qu’aux efforts sionistes d’acquisition foncière. Sirin s’enorgueillissait de trois riches boustans (vergers)  et d’oliveraies qui occupaient 9 000 dounoums cultivés (sur 17 000). La terre appartenait collectivement au village, et la taille de chaque famille déterminait se part des récoltes et du territoire. Sirin était aussi un village qui avait les relations qu’il fallait. La principale famille, les Zu’bi, s’était vu promettre l’immunité par l’Agence juive parce qu’elle appartenait à un camp collaborateur. Moubarak al-Hadj al-Zu’bi, le mukhtar, keune homme instruit qui avait des liens étroits avec les partis d’opposition, était un ami du maire juif de Haïfa, Shabtai Lévi, depuis l’époque où ils travaillaient ensemble dans la compagnie du baron Rothshild. Il était certain que les sept cents habitants de son village se verraient épargner le sort de leurs voisins. Mais il y avait un autre clan dans le village, la hamulla d’Abou al-Hija, plus fidèle à l’ex-mufti al-Hadj Amin al-Husseini et à son parti national. Selon le dossier de village réalisé par la Haganah en 1943 sur Sirin, c’était la présence de ce clan qui condamnait le village. Le dossier notait que dix membres du clan d’Abou al-Hija avaient participé à la révolte de 1936, qu’ « aucun d’entre eux n’avait été arrêté ou tué et qu’ils avaient gardé leurs dix fusils ».
Le village souffrait de temps à autre de l’animosité qui régnait entre les deux grandes hamullas, mais comme partout en Palestine, la situation s’était améliorée après la Grande Révolte, et, à la fin du Mandat, Sirin avait laissé derrière lui la scission qui l’avait déchiré dans le climat tumultueux des années 1930.
Le mukhtar de Sirin espérait que l’immunité serait encore plus assurée grâce à la présence d’un petit clan chrétien qui avait d’excellentes relations avec le reste de la population. L’un de ses membres était l’enseignant du village, et, dans sa classe de quarante élèves, il éduquait la génération suivante hors de tout préjugé politique ou affiliation de clan. Son meilleur ami était le Cheikh Muhammad al-Mustafa, imam de la mosquée locale et gardien de l’église et du monastère chrétiens qui se trouvaient aussi dans le village.
En quelques heures, ce microcosme de coexistence religieuse et d’harmonie à été ravagé. Les villageois ne se sont pas battus. Les soldats juifs ont réuni les musulmans – des deux clans  ̶  et chrétiens et leur ont ordonné de traverser le Jourdain. Puis ils ont démoli la mosquée, l’église et le monastère, ainsi que toutes les maisons. Bientôt, tous les arbres des boustans ont dépéri et sont morts. Aujourd’hui, une haie de cactus entoure les gravats qui ont été Sirin, Les juifs n’ont jamais réussi, comme l’avaient fait les Palestiniens, à exploiter les terres ingrates de la vallée, mais les sources des alentours sont encore là – étrange spectacle puisqu’elles ne servent à personne –

ILAN PAPPE -Historien Israélien- (FAYARD)

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