lundi 3 juin 2013

Les Révolutions en difficulté




New Left Review

["Post" dédié à tous les démocrates d'opérette qui, s'immiscent dans les révolutions ou les luttes des  peuples pour leur libération.
La révolution française était motivée par un idéal de justice. Ces démocrates d'opérette attisent les haines d'un peuple par idéologie politique. Ce sont les apostats de la condition humaine, surtout si leur engagement occulté un intérêt personnel ou communautariste.
N'est-ce-pas M Laurent Fabius, ministre des Affaires étagères de la France, pays des Droit de l'homme, hier, subordonné a une idéologie à l'égal du nazisme, aujourd'hui en Palestine... ]    


Déjà en 2011 les soulèvements arabes ont été organisés comme des événements capables de changer le monde, événements qui définiraient le nouvel l'esprit de nos temps politiques. L'étonnante propagation de ces soulèvements de masse, immédiatement suivis par les protestations  des "Occupy", (Tenants de la globalisation) dissipant les doutes que pouvaient avoir les observateurs de gauche, qu'ils étaient en présence d'un phénomène sans précédent: "Quelque chose de tout-a-fait nouveau", "illimité" a un "mouvement sans nom" des révolutions qui annonçait un nouveau chemin vers l'émancipation.
  • Selon Alain Badiou, la place Tahrir et tous les mouvements qui s'y sont déroulés -luttes, barricades, settings, débats, restauration et les soins prodigués aux blessés- constituait le «communisme du mouvement", postulée comme une alternative à l'État libéral -démocratie classique ou autoritaire, un concept universel qui annonçait un nouveau genre de politique, une véritable révolution.
  • Pour Slavoj Žižek, seuls ces événements politiques "radicalement nouveaux" sans les organisations hégémoniques, le leadership charismatique ou appareils de parti, pourraient créer ce qui fut appelé la «magie de Tahrir".
  • Pour Hardt et Negri, le printemps arabe, les protestations des indignées en Europe et Occupy Wall Street ont exprimé le désir de la foule pour une "démocratie réelle", pour un autre type de politique qui pourrait se substituer à l'incurable variété libérale, usé et élimé par le capitalisme corporatif. Ces mouvements, en somme, représentaient les «nouvelles révolutions du monde". [1]
[Dans le capitalisme corporatif il n'y a pas que des riches financiers, c'est une nébuleuse hétéroclite dont les intérêts peuvent paraitre différents mais  tous recherchent la suprématie sur l'humain. - Et si la nucléée est composé de têtes couronnées et de multi millionnaires, les sbires (exécuteurs de basses œuvres) sont des criminels que nos dirigeants politiques et économiques cautionnent-  C'est une nébuleuse influente et très argentée, qui se croit au dessus des lois et du respect qui est dû au droit international et à la morale civique, manipule les médias, soudoie nos dirigeants cupides qu'ils soient politiques ou économiques.
Dans leurs mains nos dirigeants politiques sont des pantins.
Pour cette caste supranationale, qui ne tient pas compte de l'ethnie, de la position sociale ou de la religion, seul compte l'apport à l'objectif recherché. Il s'ensuit, pour y parvenir,  un fonctionnement où le népotisme prend toute la place et se réalise au détriment des autres "castes". Castes (Nations ; Peuples ; Classes sociales) à qui il faut, faire perdre les acquis, les avantages, les avoirs. En ce sens les dirigeants actuels qui endettent les Etats, la Banque Goldmann Sachs et l'escroc Madoff [...] ont joué ou jouent parfaitement leurs rôles. Seul compte le but final, comme  dans le "Meilleur des Mondes" d'Aldous Huxley, la distribution des rôles (couches sociales) s'accomplit en fonction du service rendu à cette caste Supra Nationale, que l'on pourrait nommer : "Peuple élu". Et ne croyez pas qu'il suffise d'être Juif pour y être mécaniquement élu. Ce que ses "adorateurs actuels" ont omis d'intégrer dans leurs démarches, une fois les "services" rendus, c'est qu'ils puissent continuer à faire partie de cette Caste Supranationale. Dont ses "adeptes", athées ou adorateurs de l'argent, utilisent la religion ou ceux qui la servent, comme liant indispensable à un assemblage supra national.]

"Nouvelles", sans aucun doute, mais que veut dire cette «nouveauté» sur la nature de ces bouleversements politiques ? Quelle valeur leur attribuer ? En effet, alors que ces commentaires sans méfiance circulaient aux États-Unis et en Europe, les protagonistes arabes eux-mêmes s'inquiétaient sur le sort de leurs «révolutions», déplorant les dangers d'une restauration conservatrice ou de sa récupération par les free-riders. Deux ans après la chute des dictateurs en Tunisie, en Égypte et au Yémen, il n'y a pas eu de grands changements effectifs dans les institutions de ces pays ou dans les bases du pouvoir des anciennes élites. La police ; l'armée ; le pouvoir judiciaire ; les Médias contrôlés par l'Etat ; les élites des économiques, et les réseaux clientélistes des anciens partis au pouvoir sont maintenus, plus ou moins, intactes. Le fait que les dirigeants militaires provisoires égyptiens ont imposé une interdiction de la grève et ont conduit plus de 12.000 militants devant les tribunaux militaires suggère que quelque chose d'étrange entoure le caractère de ces «révolutions».
[Les USA financent l'Egypte, depuis la mort de Gamal Abdel Nasser -un des principaux porte-paroles des pays non-alignés - Avec l'arrivé d'Anouar el-Sadate un traité de paix israélo-égyptien est signé le 26 mars 1979 à Washington par Anouar el-Sadate et Menahem Begin. Suite à cet accord et aux difficultés "économiques" les USA allouent  à l'Egypte une allocation de plus de 500 M$ annuels. [Les renseignements concernant cet aspect de la négociation a été et est maintenu sous une chape de plomb...] j'ai néanmoins trouvé dans le journal "Figaro" du 3/03/2013 une information où les USA donnent 250 M$ à l'Egypte, pour les aider à surmonter la grave crise économique ! -Les Frères musulmans, s'opposent depuis toujours à la politique de colonisation et  hégémonique d'Israël à l'égard des palestiniens, vainqueurs des élections les F.R. ont du revoir leur velléités à l'égard de la politique israélienne s'ils voulaient percevoir cette aide. Pourtant le Colonel Nasser avait nationalisé le Canal de Suez, - 3e ressource du pays.
C'est à dire, si dans des pays comme l'Egypte, la "révolution" n'a pas atteint les bénéfices escomptés, il se peut que les raisons, de ce relatif échec, ne soit pas liée exclusivement aux forces en présence mais qu'en sous-main des paramètres qui nous échappent viennent perturber la formidable lutte d'un peuple pour sa liberté.
Je considère, en effet, que l'influence sioniste où les néoconservateurs pro-israéliens y font leur loi, aussi bien aux USA qu'en Europe, (principalement à la Commission européenne et les principaux Etats) parasite la perception que nous devrions avoir de la politique internationale, mais surtout celle du Proche et Moyen-Orient.]

Dans un sens, ces réactions opposées -louanges et lamentations- reflètent la réalité paradoxale des «révolutions» arabes, si nous comprenons le terme «révolution» dans le sens de, au minimum, une transformation rapide et radicale de l'Etat impulsé par des mouvements populaires de base. Les opinions polarisées font écho à la séparation profonde entre deux dimensions clés de la révolution: le mouvement et le changement. Les récits laudatifs se sont porté principalement sur la  «Révolution comme un mouvement» dans les épisodes dramatiques de grande solidarité et de sacrifice, l'altruisme et la proposition commune, a crée un précédent à Tahrir.

Ici, l'accent est mis sur les moments extraordinaires vécus tout au long de la mobilisation révolutionnaire, où les attitudes et les comportements se soudain se transforment: les divisions sectaires s'évanouissent, règne l'égalité des sexes et l'égoïsme diminue, les classes populaires montrent une remarquable capacité innovation dans l'activisme, l'auto-organisation et le processus de décision démocratique. Ces épisodes pertinents méritent certainement d'être soulignés et documentés, toutefois, l'accent mis sur la "révolution comme un mouvement" a servi à masquer la nature particulière de ces «révolutions» en termes de changement, avec peu ou pas de vision future après que les  dictateurs aient abdiqué. Ils peuvent même être utilisés pour masquer les paradoxes de ces soulèvements, modelés par les nouveaux temps politiques dans lequel les grandes visions et utopies de projets émancipateurs ont laissé la place à des projets fragmentés, improvisés et imprécis de réseaux horizontaux.
[Dans ce délitement, les manipulations des dirigeants politiques et les médias de brocante y sont pour beaucoup.]

Stratégies de transformation
Vivons-nous réellement un temps de révolution ? Dans un sens, oui. La crise de la démocratie libérale occidentale et le manque de gouvernements responsables dans de nombreuses parties du monde, avec la montée des inégalités et un sentiment de privation qui affecte de larges segments de la population mondiale, y compris les couches de la population instruites et qualifiée soumis à tournant néolibéral, ont créé une véritable impasse politique a renforcé la nécessité d'un changement drastique. Une décennie plus tôt, David Harvey avait identifié ce malaise, affirmant que le monde avait besoin plus que jamais un Manifeste communiste. [2] Mais, hier comme aujourd'hui, un monde qui a besoin de révolutions ne signifie pas qu'il ait la capacité de les générer s'il n'a pas les moyens et la vision nécessaire d'une transformation fondamentale. Dans un autre sens, pourtant, il se peut que ceux-ci ne soient pas des temps de révolution comme des temps de paradoxe, quand a la possibilité de la "révolution entant que changement" -c'est à dire, de transformation rapide et radicale de l'Etat- a été totalement miné, au fur et à mesure de la médiatisation de la "révolution comme un mouvement". Les soulèvements arabes ont exprimé cette anomalie. Pas étonnant alors que leurs chemins -sauf dans le cas de la Libye et de la Syrie, qui a pris la forme de guerres révolutionnaires médiatisées par l'intervention militaire étrangère- ne ressemblent pas à aucune des voies connues de changement politique: réforme, insurrection ou d'implosion. Elles semblent avoir leur caractère propre.
[Plus qu'un manifeste communiste ce que l'Occident (et le monde) a besoin ce sont des dirigeants honnêtes, élus pour mettre leurs compétences au service des populations dont ils ont pris consciemment la charge, au lieu d'œuvrer pour le bien personnel ou communautariste. Les crises à répétition que nous subissons sont largement raisonnées et programmées, crises où les Etats s'endettent au profit de la finance privé et où les populations perdent les acquis sociaux et sociétaux.]   

Historiquement, les mouvements sociaux et politiques qui suivent une stratégie réformiste ont tendance à organiser une campagne soutenue par la pression sur le régime au pouvoir afin que ce dernier réalise les réformes, utilisant pour cela les institutions existantes de l'Etat. Qui se basant sur la mobilisation de la puissance sociale des classes populaires, le mouvement d'opposition oblige les politiciens à réformer leurs lois et leurs institutions, souvent par une sorte de pacte négocié. Le changement a lieu dans le cadre des accords politiques existants. La transition vers la démocratie dans des pays comme le Brésil et le Mexique dans les années 1980 était de cette nature. La direction du mouvement vert iranien suit un chemin réformiste similaire. Dans cette trajectoire, la profondeur et la portée des réformes peuvent varier: le changement peut être superficiel, mais peuvent aussi être profond, si elle prend la forme d'une somme de réformes juridiques, institutionnelles, politiques et culturels.
Au contraire, la voie insurrectionnelle requiert qu'un mouvement révolutionnaire constitutif a une assez longue période dans temps, le développement du leadership et une structure organisationnelle reconnue, avec un plan pour un nouvel ordre politique.

Alors que le régime au pouvoir déploie son appareil policier et militaire pour résister à tout changement, les désertions commencent à diviser la coalition au pouvoir. Le camp révolutionnaire progresse, attire les transfuges, forme un gouvernement de l'ombre et construit des structures de pouvoir alternatives. Cela impose des limites à la capacité de l'État à gouverner son propre territoire, créant une situation de «double pouvoir» entre le régime et l'opposition, qui, généralement possède un leader charismatique du type Lénine, Mao, Castro, Khomeiny, Walesa et Vaclav Havel. Quand la révolution réussit, la situation de double pouvoir culmine dans une bataille insurrectionnelle dans laquelle le camp révolutionnaire prend le pouvoir par la force, supprime les anciens organes de l'autorité et en établit de nouveaux. Là il y a une réforme globale de l'Etat, avec de nouveaux personnels, nouvelle idéologie et un mode alternatif de gouvernement. La révolution cubaine de 1959, la révolution sandiniste au Nicaragua et la révolution iranienne, toutes deux en 1979, sont des exemples à travers l'insurrection. Le régime de Kadhafi fit face à un soulèvement révolutionnaire sous la direction du Conseil national de transition, avec le soutien de l'OTAN, depuis Benghazi libérée pour capturer Tripoli.
[C'est moins un régime d'Etat qui déploie son appareil répressif, que cet Occident malade, qui finance et arme les oppositions des Etats qui ne cautionnent pas sa politique, comme l'Irak, la Libye, la Syrie ou l'Iran,... ou à contrario  fournir les outils pour "mater" la révolte, autant que faire se peut, comme en Tunisie ou en Egypte mais l'Occident à du "lâcher prise" sur la pression de la population et non a cause d'une ingérence extérieure,  contrairement à la Syrie où les premières manifestation furent pacifiques mais la CIA arma quasiment dès le début de l'insurrection des éléments radicaux, menant aux massacres d'innocents.]

Il ya une troisième possibilité: la «implosion du régime." Une révolte peut prendre de l'ampleur en raison de grèves ou d'autres formes de désobéissance civile, ou par la guerre révolutionnaire, venant progressivement à entourer la capitale, de sorte que finalement elle produit l'implosion du régime, son effondrement au milieu de la désorganisation, les défections et le désordre total. A leur place, les élites alternatives forment rapidement de nouveaux organes du pouvoir, dans des conditions souvent de confusion et de désordre, dans les mains de personnes ayant peu d'expérience de la fonction publique. Le régime de Ceausescu en Roumanie s'est effondré au milieu de la violence et le chaos politique en 1989, mais a été remplacé par un ordre politique et économique très différent sous une organisation nouvellement créé, le Front de salut national, dirigé par Ion Iliescu. Tant dans l'insurrection que dans l'implosion, les intentions de transformer le système politique ne fonctionne pas à travers les institutions étatiques existantes, mais en dehors d'eux, contrairement à la voie réformiste.

Mouvements sui generis
Les «révolutions» égyptienne, tunisienne et yéménite n'ont pas semblé suivre aucune de ces voies. Une première caractéristique à souligner, est sa rapidité. En Egypte et en Tunisie, les puissants soulèvements de masse ont eu des résultats très rapides: les Tunisiens en un mois et les Egyptiens en seulement  dix-huit jours, ont réussi à expulser les anciens despotes et a démanteler une série d'institutions leur étant associés -entre autres, les partis politiques, les organes législatifs et un certain nombre de ministères- se compromettant avec les politiques de réforme constitutionnelles et politique. Ces progrès ont été obtenus d'une manière qui était, en termes de standards relatif, notamment civique et pacifique ainsi que rapide. Mais ces victoires rapides, contrairement aux émeutes prolongées au Yémen et en Libye, ou Bahreïn et la Syrie, qui laissèrent peu de temps aux oppositions respectives pour construire leurs propres organes parallèles de gouvernement, si cela avait été son intention. Au lieu de cela, les révolutionnaires voulaient que les institutions du régime -l'armée égyptienne, par exemple- mènent à bien les substantielles réformes au nom de la révolution: changer la Constitution, la tenue d'élections, assurer la liberté des partis politiques et de instaurer un gouvernement démocratique. Il y a, ici, une anomalie fondamentale de ces révolutions: elles jouissaient d'un énorme prestige social, mais n'avaient pas l'autorité administrative,  ont atteint un certain degré d'hégémonie, mais ne sont pas arrivés réellement à gouverner. Ainsi, les régimes en place sont restés plus ou moins intacts, il y a eu peu d'institutions étatiques ou moyens de gouvernance, nouveaux qui puissent incarner la volonté de la révolution. Dans la mesure où émergeaient de nouvelles structures, elles ont été rapidement occupées non par les révolutionnaires mais par des opportunistes –free-riders– c'est-a-dire : courants politiques traditionnellement bien organisés dont les leaders s'étaient maintenus au début en marge des luttes contre les dictatures.

Il est vrai que les révolutions en Europe centrale et orientale en 1989 ont également été étonnamment rapides et, pour la plupart, non-violente: l'Allemagne de l'Est a duré dix jours ; la de Roumanie, seulement cinq. Qui plus est, contrairement à l'Egypte, le Yémen ou la Tunisie, elles ont réalisé une transformation complète des systèmes politiques et économiques nationaux. Cela pourrait s'expliquer en disant que la distance entre ce que le peuple avait -Un État communiste à parti unique avec une  économie dirigée- les attentes étaient grandes, - démocratie libérale et l'économie de marché- que la trajectoire du changement devait d'être révolutionnaire. Toute réforme intermédiaire et superficielle aurait été facilement détectée et auraient dû faire face a des résistances. [3] Il était question de quelque chose de très différent du modèle révolutionnaire en Egypte et en Tunisie, où la demande de «changement», «liberté» et «justice sociale» se définissait si vaguement qu'elle fut récupéré par la contrerévolution. En ce sens, les expériences de l'Egypte et de la Tunisie ressemblaient d'avantage a la Géorgie, la «révolution des roses» de 2003, ou de l'Ukraine, la "révolution orange" de 2004 à 2005, où, dans les deux cas, le mouvement populaire massif et soutenu renversa les gouvernements corrompus existants. Dans ces cas, la trajectoire était, en fait, plus réformiste que révolutionnaire.
[IL me semble que l'effondrement de l'Union soviétique a beaucoup contribué à la rapidité de la transition. En effet, les anciens pays, dits de l'Est, étaient pour la propagande soviétique des pays frères, mais ces dernies se sentaient d'avantage sous le Youg d'une dictature que d'une union où leur avis comptait. La déconfiture soviétique a libéré ses peuples qui se sont tournées en grande majorité vers l'ouest avant de "tomber" dans la mondialisation qui le s'opprime autant que le communisme à la différence près, qu'aujourd'hui leurs dirigeants sont d'accord pour les garrotter...]
     
Cependant, il y avait un aspect plus prometteur dans les soulèvements arabes, une impulsion révolutionnaire puissante plus profonde et plus large, que les protestations en Géorgie et en Ukraine. En Tunisie et en Egypte, la sortie des dictateurs et leur appareil de coercition a cédé la place à un espace sans précédent pour les citoyens, en particulier pour les classes populaires, pour récupérer leurs sociétés et s'auto affirmer. Comme avec la plupart des situations révolutionnaires, beaucoup d'énergie fut libérée et une sensation incomparable de renouvellement a transformé la sphère publique. Les partis politiques interdits ont émergé de l'ombre et s'en sont créé de nouveaux, au moins douze en Egypte et plus d'une centaine en Tunisie. Les organisations sociales se sont fait entendre et ont commencé à émerger les appels d'initiative populaires. Disparue la menace de persécution, les travailleurs se sont battus pour leurs droits, les grèves et actions spontanées sont apparues partout. En Tunisie, les syndicats existants ont joué un rôle plus important.

En Egypte, les travailleurs ont fait pression pour obtenir de nouveaux syndicats indépendants: la Coalition des travailleurs de la révolution du 25 Janvier a confirmé les principes de la révolution: changement, liberté, justice sociale. Les petits agriculteurs ont demandé des syndicats indépendants ; les populations des bidonvilles du Caire ont commencé à construire leurs premières organisations autonomes, les groupes de jeunes se sont battus pour améliorer les bidonvilles, ont élaboré des projets civiques et ont retrouvé leur fierté. Les étudiants sont descendus dans les rues pour exiger du ministère de l'Éducation de réviser leurs programmes. De nouveaux groupes se sont formés, en Egypte, le Front révolutionnaire de Tahrir ; en Tunisie, l'Organe Suprême de mise en œuvre des Objectifs de la Révolution, afin de faire pression sur les autorités  postrévolutionnaires pour qu'elles réalisent des réformes importantes. Bien sûr, tout cela représente des niveaux de mobilisation populaire propres en ces moments exceptionnels. Mais l'extraordinaire sensation de libération, l'impulsion de l'autoréalisation, le rêve d'un ordre social juste, en définitive, est un désir «tout nouveau», c'est ce qui définit l'esprit de ces révolutions. Cependant, à mesure que ces strates sociales de masse avançaient grâce à leurs élites, il est apparu la principale anomalie de ces révolutions: l'écart entre le désir révolutionnaire du "nouveau" et une voie réformiste qui pourrait mener à l'enracinement du «vieux».

Réfolutions ?
Alors, comment pouvons-nous saisir la signification des soulèvements arabes, deux ans après l'éviction de Moubarak et Ben Ali ? Jusqu'à présent, les monarchies de Jordanie et du Maroc ont opté pour les réformes politiques mineures. Au Maroc, le changement constitutionnel a permis au chef du parti majoritaire au Parlement pour former un gouvernement. En Syrie et au Bahreïn, les batailles prolongées contre le pouvoir coercitif des régimes respectifs ont conduit les révoltes à opter  pour une voie insurrectionnelle dont les résultats restent a voir. Le régime libyen a été renversé dans la guerre révolutionnaire violente. Mais les soulèvements en Egypte, Yémen et Tunisie ont eu un parcours spécifique qui ne peut être caractérisé ni de «révolution» en soi ou simplement en termes de mesures «réformiste». Au lieu de cela, il peut être judicieux de parler de "révolutions refoluciones" qui visent à promouvoir des réformes au sein et entre les institutions du régime actuel. [4]
[Il faut reconnaitre que, principalement en Tunisie et en Egypte où les despotes étaient "protégés" par la France, une fois le "pot-aux-roses- découvert, l'Occident ne pouvait plus faire semblant d'une  appartenance à la démocratie tout en soutenant des dictateurs. C'est finalement la caractéristique du "Printemps Arabe" où la transition le fut, dans une relative organisation et où l'éviction de l'autocrate s'est faite à la demande de ses protecteurs. Reconnaissons que le résultat espéré n'a pas été atteint, ni pour les "révolutionnaires" ni pour les "souteneurs" de tyrans.]      
En tant que tel, les «refoluciones" incarnent réalités paradoxales. Elles ont l'avantage d'assurer une transition ordonnée, éviter la violence, la destruction et le chaos, c'est à dire les maux qui augmentent considérablement le coût du changement. Les excès révolutionnaires, le «règne de la terreur» et les procès sommaires ont pu être évités. Cependant, la possibilité d'une transformation réelle a travers des réformes du système et des pactes sociaux dépendent de la mobilisation permanente et de la surveillance des organisations populaires -des associations civiques, les syndicats, les mouvements sociaux de travail, les partis politiques- exerçant une pression constante. Le contraire, les "refoluciones" enferment le danger permanent d'une restauration contrerévolutionnaire, précisément parce que la révolution n'a pas atteint les institutions clés du pouvoir d'Etat. Imaginez comment des intérêts puissants, blessés par la férocité des soulèvements populaires, essayant désespérément de se réorganiser,  fomentant des sabotages et la diffusion de "propagande noire". Les élites vainques peuvent répandre le cynisme et la peur en invoquant le «chaos» et d'instabilité, afin de générer la nostalgie de l'époque «sécuritaire» de l'ancien régime. Les anciens hauts-fonctionnaires, les ancien  apparatchiks du parti, les rédacteurs en chef, des hommes d'affaires de haut-niveau et les lésées des services de sécurité opérationnelle et d'intelligence peuvent infiltrer les institutions de pouvoir et de propagande pour changer les choses en leur faveur.

Au Yémen, les principaux éléments de l'ancien régime sont restés intactes, malgré un air de  liberté et d'un activisme indépendant que promet de stimuler la réforme politique. Les anciens groupes dirigeants et la mafia économiques de Tunisie sont prêts à se battre pour barrer la route à un véritable changement, pour se faire ils ont à leur disposition un réseau dense de factions et organisations économiques. En Egypte, le Conseil Suprême des FFAA (forces armées) a été responsable de la répression généralisée, l'emprisonnement d'un grand nombre de révolutionnaires et la fermeture des organisations d'opposants. Le danger d'une restauration, ou simplement un changement superficiel, s'aggrave à mesure que disparait  la ferveur révolutionnaire disparaît, la vie revient à la normale et les gens sont désabusés, les conditions ont commencé à apparaître sur la scène politique arabe.

Temps différents,
Pourquoi les soulèvements arabes, à l'exception de la Libye et de la Syrie, prennent ce caractère "refolucionaire» ? Pourquoi les principales institutions de l'ancien régime restent intactes, tandis que les forces révolutionnaires sont marginalisées ? En partie, cela est liée avec la vitesse de la chute des dictateurs, qui donna l'impression que la révolution avait pris fin, qu'elle avait atteint ses objectifs, sans un changement important dans la structure du pouvoir. Comme nous l'avons vu, cette "victoire" rapide n'a pas offert de nombreuses opportunités pour les mouvements de créer des organes de pouvoir alternatifs, même s'ils avaient l'intention de le faire. En ce sens, ces révolutions ont eu cette autolimitation. Mais il y avait autre chose en jeu: les révolutionnaires se sont maintenus en dehors des structures de pouvoir, parce qu'il  n'était pas dans ses intentions de prendre le contrôle de l'Etat. Et quand, dans les étapes ultérieures, ils ont réalisé qu'ils devaient le faire, ils ne disposaient pas des ressources politiques, l'organisation, le leadership, la vision stratégique, nécessaires pour prendre le contrôle des ces deux anciens régimes comme l'on fait les free-riders, tel les Frères musulmans, qui avaient joué un rôle limité dans le soulèvement, mais avaient la capacité organisationnelle pour prendre le pouvoir. Une différence majeure entre les révoltes arabes et leurs prédécesseurs du XXe siècle, c'est que ceux qui se sont produits dans les temps idéologiques très altérés.

Jusqu'aux années 1990, les trois grandes traditions idéologiques avaient été les porteurs de la «révolution» comme une stratégie pour un changement fondamental: le nationalisme anticolonial, le marxisme et l'islam. La première, qui se reflète dans les idées de Fanon, Sukarno, Nehru, Nasser ou Ho Chi Minh, l'ordre social conçu après l'indépendance comme quelque chose de nouveau, comme un déni de la domination politique et économique de l'ancien système colonial et le clientélisme bourgeois . Malgré les promesses dépassant de loin leur capacité de réalisation, les régimes post-coloniaux ont accompli des progrès dans des domaines tels que l'éducation, la santé, la réforme agraire et l'industrialisation, les mesures qui ont été renforcées dans les plans nationaux de développement (Al Mithaq, l'Egypte (1962) Déclaration d'Arusha (1967) Lignes directrices Mwongozo (1971), en Tanzanie). Ses principales réalisations ont été atteintes dans la construction de gouvernement: l'administration, les infrastructures, formation nationales de classes. Cependant, les gouvernements nationalistes ont commencé à perdre leur légitimité par l'incapacité a faire face aux problèmes de base tels que l'inégalité dans la propriété foncière et de la distribution de la richesse. A mesure que les anciens révolutionnaires anticolonialistes sont devenus des administrateurs de l'ordre postcoloniaux, n'ont pas pu, dans une large mesure, accomplir leurs promesses, et dans de nombreux cas, les gouvernements nationalistes sont devenus des autocraties, accablés par la dette, puis forcés à adopter des programmes néolibéraux d'ajustement structurel, quand ils ont été renversés par des coups militaires ou minés par les intrigues impérialistes.
Aujourd'hui, le mouvement palestinien est peut-être le dernier a continuer la lutte pour l'indépendance nationale.

Le marxisme était, sans doute, le courant révolutionnaire le plus formidable de l'époque de la Guerre Froide. Révolutions vietnamienne et cubaine ont inspiré une génération de radicaux: Ernesto Che Guevara et Ho Chi Minh sont devenus des figures emblématiques, non seulement en Asie, en Amérique latine et au Moyen-Orient, mais aussi entre les mouvements étudiants des États-Unis, Paris, Rome et Berlin. Les mouvements de guérilla sont venus  symboliser le radicalisme des années 1960. Ils ont eu une grande croissance en Afrique, après l'assassinat de Patrice Lumumba et le resserrement de l'apartheid en Afrique du Sud. Dans les années 70 une vague de révolutions "marxiste-léniniste" a renversé le gouvernement colonial au Mozambique, l'Angola, la Guinée-Bissau et d'autres pays. Bien que la stratégie d '«insurrection elle-même» promue par Che Guevara portait pas de fruits en Amérique latine, a eu des soulèvements réussis en Grenade et au Nicaragua dans les années 1970, tandis que El Salvador a semblé être un autre candidat possible a la percée. Les révolutionnaires américains ont trouvé un nouvel allié dans la théologie de la libération à rejoindre le combat. Au Moyen-Orient, Front de libération nationale expulsé les Anglais de Aden et proclamé la République populaire du Yémen du Sud, et les guérilleros de gauche a joué un rôle majeur en Iran, Oman et les territoires occupés de Palestine. L'impact de ces mouvements révolutionnaires dans le climat intellectuel de l'Occident était indéniable, en aidant explosent dans le monde entier la rébellion de la jeunesse, les étudiants, les travailleurs et les intellectuels en 1968. En 1974, la Révolution des Œillets a renversé la dictature au Portugal. Alors que certains partis communistes d'Europe et du monde en développement ont suivi un cours de plus en plus réformiste eurocommunisme, le nombre de forces au sein de la tradition marxiste-léniniste est resté attaché à la stratégie de la révolution.

Mais la situation a radicalement changé avec la chute du bloc soviétique. Le concept de révolution avait été si intrinsèquement associé au socialisme que la disparition du «socialisme réellement existant» et la chute du Mur de Berlin à la fin de 1980 impliquait la fin des "révolutions", et le développement dirigé par l'État. Le concept d'étatisme fut l'anathème de l'étatisme inefficace et répressif, tout en conduisant à l'érosion de l'autonomie et de l'initiative. Cela a eu une influence profonde sur la notion de révolution, qui met l'accent sur ​​le pouvoir de l'Etat, désormais identifié avec l'autoritarisme et les échecs du bloc communiste. L'avance du néolibéralisme, de 1979 à 1980 avec la victoire de Thatcher et Reagan, qui se répandit plus tard que l'idéologie dominante dans la plupart des pays, a joué un rôle central dans ce changement de discours. Au lieu des mots «Etat» et «révolution» c'était croissance exponentielle et de nouveaux concepts tels que les «ONG», la «société civile», «sphères publiques» et ainsi de suite. En bref, la réforme. Le passage progressif est devenu la seule façon acceptable de transformation sociale. Les gouvernements occidentaux, les organisations humanitaires et les ONG constamment passer le nouvel évangile. L'expansion du secteur des ONG dans le monde arabe et l'hémisphère sud en général signifiait un changement drastique activisme social inspiré par les intérêts collectifs à mettre l'accent sur ​​l'auto-assistance individuelle dans un monde concurrentiel. Dans ces temps néolibéraux, l'esprit égalitaire de la théologie de la libération.
[Si l'auteur dit : "que la notion d'Etat issu du Bloc socialiste a été identifié comme étant autoritaire et un échec économique". Il ne dit pas  que l'idéologie de la Globalisation actuelle est un échec, aussi. En effet, la répartition des richesses n'a jamais été aussi mal faite et économiquement les Etats n'ont jamais été aussi endettées que depuis que la haute finance à imposé sa vision de la société, des financements des Etats et les règles de la globalisation.
Un autre aspect de cette fuite en avant, est que la course effrénée à l'argent est passée devant la morale humaine et on se trouve aujourd'hui devant des dirigeants politiques qui sont de véritables escrocs et des va-t-en-guerre irrécupérables, remarquables cupidité et par leur déloyauté, tant ils usent et abusent de manipulations y compris à l'encontre de leurs propres populations.]
(Le "Roi" ne défend plus ses sujets, mais son ambition et sa caste.)

La troisième tradition a été celle de l'islamisme révolutionnaire, un adversaire idéologique du marxisme, cependant, il portait l'empreinte de son rival séculaire. Depuis les années 1970, les mouvements islamistes étaient fondés sur les idées de Sayyid Qutb dans son combat contre les états laïques du monde musulman. Qutb lui-même avait beaucoup appris du leader islamiste indien Abul Maududi, qui à son tour avait été impressionné par la stratégie organisationnelle et politique du Parti communiste de l'Inde. Avec son pamphlet de 1964 intitulé Milestones (jalons), qui prônaient une avant-garde musulmane capable d'attaquer l'Etat infidèle et établir un véritable ordre islamique, Qutb est devenu l'équivalent islamique de Lénine avec son "Que faire ?", orientant la stratégie des groupes militants comme le Jihad, Djamaa al-Islamiyya, Hizb ut-Tahrir et Laskar Jihad. Un certain nombre d'ex-gauchistes -Adel Hussein, Mustafa Mahmoud, Tariq al-Bishri-désertèrent du camp islamiste, emportant les idées de la tradition marxiste-léniniste. La révolution iranienne de 1979 était basée sur les idées de la gauche et de Qutb. Milestones  avait été traduit par l'ayatollah Khamenei, le guide suprême actuel. Le groupe marxiste-léniniste Fedayan-e Khalq et le «islamo-marxiste» Moudjahidin-e-Khalq a joué un rôle important dans la radicalisation de l'opposition contre la dictature du Shah. Le plus important peut-être, était le théoricien et vulgarisateur Ali Shariati qui, entant qu'étudiant  gauchiste français Georges Gurvitch, a parlé avec passion de la «révolution» dans un mélange d'expressions marxistes et religieux, invoquant une «société sans classes divine". [5] Le concept de révolution était donc, essentiel pour le militantisme islamique, à la fois dans sa forme sunnite que chiite. Par conséquent, cette tradition était à l'opposé de la stratégie électorale islamiste des Frères musulmans, qui aspirait à obtenir un soutien social suffisant pour prendre l'état par des moyens pacifiques. [6]

Mais au début du siècle, la croyance dans la révolution des militants islamistes avait aussi perdu du souffle. En Iran, par exemple, la notion si chère avant la «révolution» avait changé, et a été assimilée à la destruction et à l'extrémisme, au moins jusqu'au  la victoire présidentielle de Mohammad Khatami en 1997. L'Islam, entendu comme un mouvement qui considère l'islam comme un système intégral qui fournit des solutions aux crises sociales, politiques et économiques, avec un accent plus grand sur ​​les obligations que sur les droits, entrait en crise. Les dissidents ont fait valoir que, dans la pratique, c'est l'«Etat islamique» qui a favorisé la ligne dure de l'Iran, Jamaat-e-Islami au Pakistan et Laskar Jihad en Indonésie, entre autres, était préjudiciable autan à l'islam qu'à l'État. À la fin des années 90 et au début du siècle actuel a vu l'émergence de ce que j'appelle les tendances postislamistas. Celles-ci restent religieuse, pas laïque, mais son objectif est de transcender les politiques islamistes, en promouvant une société pieuse et un État laïque qui combine la religiosité des droits, à des degrés divers. Corrientes postislamistas comme l'AKP en Turquie, le parti Ennahda en Tunisie et du Parti de la Justice et du Développement au Maroc suite à une voie réformiste vers le changement social et politique, et se basent sur les concepts de l'après-guerre froide, comme "la société civile », « responsabilité », « non-violence » et « gradualisme ». [7]

La baisse de l'espérance
Ainsi, les révoltes arabes ont eu lieu à un moment où le déclin des idéologies opposées, le nationalisme anticolonial, le marxisme-léninisme et de l'islamisme, avait déjà discrédité l'idée même de «révolution». C'était une époque très différente, par exemple, à la fin des années 1970, quand mes amis et moi, en Iran, a mesure que nous invoquions le concept, malgré que cela semblait déraisonnable: sur nos vélos à travers les quartiers opulents du nord de Téhéran nous spéculions sur l'confiscation des palais du Shah et la distribution des luxueuses demeures. Nous pensions en termes de révolution. Mais au Moyen-Orient du nouveau millénaire, presque personne n'imaginait le changement en ces termes. Peu d'activistes arabes proposaient vraiment des stratégies de révolution, même s'ils y rêvaient. En général, le désir était de réforme, de changement significatif dans le cadre de la politique existante. En Tunisie, presque personne ne pensait que la révolution, de fait, sous le régime policier de Ben Ali, l'intelligentsia avait subi une «mort politique», comme quelqu'un me l'a dit. [8] En Egypte, Kefaya et le Mouvement du 6 Avril, malgré ses tactiques novatrices étaient essentiellement réformiste, dans la mesure où ils avaient une stratégie pour le renversement de l'Etat. Certains de ses militants auraient reçu une formation aux Etats-Unis, Qatar, Serbie, principalement dans les domaines de l'observation des élections, la protestation non-violente et la création de réseaux. Par conséquent, ce qui a émergé avec le développement des soulèvements n'étaient pas des révolutions en soi, mais "refoluciones", c'est à dire les mouvements révolutionnaires qui cherchaient à forcer les régimes au pouvoir à se réformer.

En vérité, les gens peuvent avoir ou non une idée de «révolution» pour qu'elle ait lieu: que se produisent des soulèvements de masse qui aient peu à voir avec les théories révolutionnaires. Ils ne sont pas le résultat de complots ou d'une planification, même si des gens spécifiques peuvent conspirer et les planifier. Les révolutions "juste" se succèdent. Maintenant, avoir ou non des idées au sujet de la révolution a une influence décisive sur le résultat, quand elles se produisent. Le caractère "refolucionario" des soulèvements arabes signifie que, dans le meilleur des cas, sont inachevées, puisque les principaux intéressés, les institutions des anciens régimes et les free-riders ne parviennent à satisfaire les demandes d'un changement significatif. Ce résultat doit être douloureux pour ceux qui s'attendaient à un avenir juste et digne. Il peut être réconfortant de se rappeler que la plupart des grandes révolutions du XXe siècle, la Russie, la Chine, Cuba, l'Iran, qui ont réussi à renverser les anciens régimes autocratiques, ont rapidement crée des nouveaux Etats, tout aussi autoritaires et répressif.
[Là, aussi, ce que l'auteur ne dit pas, c'est que ces régimes que la révolution à réussi à renverser, étaient des régimes où la caste au pouvoir régnait de manière autocratique sur ses sujets, la Russie des Tsars, la Chine des empereurs, la Cuba de la débauche, protégé par les  USA, l'Iran des Pahlavi, où sévissait la police la plus répressive au monde, la SAVA mise en place par la CIA..., et c'est tout naturellement que ces nouveau régimes ont du se protéger de l'hégémonisme américaine. Par ailleurs on peut le constater :"tous les pays qui ont adopté le nouveau système de financement des Etats, ruine ces derniers  et les populations, perdent les unes après les autres, les avancées sociétales acquises au prix de millions de victimes."
Le cas de la Russie est significatif : après l'effondrement, suite à la pérestroïka de Mikhaïl Gorbatchev  où le fonctionnement libéral de Boris Eltsine qui avait mis la Russie à genoux et où la cupidité émergerait dans tous les domaines de l'Etat, il n'a laissé à Vladimir Poutine d'autre solution que d'instaurer un régime autoritaire, s'il ne voulait pas se faire phagocyter par l'hégémonisme occidental. Et nous pouvons remarquer, qu'il a eu raison, puisque la Russie compte à nouveau dans le concert international.]
D'autres effets secondaires du changement révolutionnaire radical sont les substantielles perturbations de l'ordre et de l'administration. Libye, où le régime de Kadhafi a été renversé violemment, ne peut pas être l'objet d'envie pour les activistes égyptiens et tunisiens.
- Qui a orchestré le désastre Libyen ? Nous sommes d'accord.
La combinaison de la brutalité de Kadhafi et les intérêts occidentaux du pétrole libyen a conduit à une insurrection violente et destructrice, aidé par l'OTAN, qui a mis fin au vieux régime despotique d'un autre âge. Mais le nouveau gouvernement n'a pas encore crée un système politique plus ouvert et transparent. Le Conseil national de transition (CNT) maintien secret l'identité de la majorité de ses membres et de son processus décisionnel.
Les divisions internes entre islamistes et laïques, le manque d'autorité effective sur un certain nombre de milices incontrôlées, et les rares capacités administratives font du CNT un groupe de gouvernement mal équipés. [9] Le pays a connu d'importantes perturbations, la sécurité, l'administration et la prestation de services de base d'infrastructures, jusqu'à l'autorité du CNT a été transférée à un organisme civil élu.
- Une nouvelle fois, de gauche comme de droite, en Libye ou au Mali, la servilité de la France c'est manifestée devant les impératifs américains, Etat, lui même sous influence judéo/sioniste. 
Ce n'est pas question, ici, de dénigrer l'idée de révolutions radicales, car il ya de nombreux aspects positifs dans ces expériences, un nouveau sentiment de libération, liberté de parole et les possibilités ouvertes pour un avenir meilleur, parmi les plus évidents.
- L'avenir sera meilleur, s'ils n'y imitent pas la cupidité de l'Occident...
Au contraire, il convient de noter que le renversement révolutionnaire d'un régime répressif en soi ne garantit pas un ordre plus juste et plus juste. En effet, les révolutions radicales peuvent porter en elle les germes d'un régime autoritaire, comme la restructuration de l'État et l'élimination de la dissidence peut laisser peu de place pour le pluralisme et la concurrence politique au sens le plus large. En revanche, le "refolución" peut créer un meilleur environnement pour la consolidation de la démocratie électorale, puisque, par définition, n'est pas en mesure de monopoliser le pouvoir d'Etat. Cependant, l'émergence de multiples centres de pouvoir, y compris ceux de la contrerévolution, peut neutraliser les excès des nouvelles élites politiques. Ainsi, les Frères musulmans en Egypte et en Tunisie le parti Ennahda, ont peu de chance de monopoliser le pouvoir de la manière qu'on fait les Khumeinistes dans l'Iran postrévolutionnaire, précisément à cause d'une série de puissants intérêts, y compris ceux de l'ancien régime sont encore actifs et efficaces.
[La vision de dureté du régime iranien est surenchérie par les USA, Israël et les médias occidentaux. Si l'Iran supporte mal l'opposition, c'est dû, autant, a la dureté de son régime que par la convoitise américaine et sa volonté  d'y instaurer l'ancienne dynastie, qui lui permettait d'exploiter son pétrole.] 
Il peut donc être utile d'envisager une autre compréhension de la «révolution» en vertu des lignes élaborées par Raymond Williams dans The Long Révolution, c'est-a-dire, un processus qui est "difficile" dans le sens d'un complexe multiforme, «total», qui signifie transformateur, non seulement économique mais aussi social et culturel, et «humain», avec la participation des structures plus profondes de relations et sentiments. [10] Par conséquent, au lieu de chercher des résultats rapides ou se soucier de faire des demandes, nous pourrions voir les soulèvements arabes comme des "révolution longues" qui pourraient porter ses fruits dans dix ou vingt ans, en établissant de nouvelles façons de faire les choses et de nouvelles façons de penser le pouvoir. Cependant, ce qui est en jeu n'est pas seulement de simples préoccupations sémantiques au sujet de la définition de révolutions, mais les problèmes difficiles des structures du pouvoir et des intérêts bien établis. Indépendamment de la façon dont nous caractérisons le processus comme "longue révolution" ou comme un processus qui commence par la transformation radicale de la l'Etat, la question fondamental est de savoir comment parvenir à un changement essentiel à partir de l'ancien ordre autoritaire pour inaugurer un changement démocratique significatif, et en même temps éviter la coercition violente et l'injustice. Une chose est certaine, cependant: le chemin du "vieux" oppresseur au "nouveau" libérateur ne sera pas couvert sans luttes et mouvements populaires incessants, dans les sphères publiques et privées. En effet, la «révolution longue» peut commencer, même lorsque finit la "révolution courte".


Notas:
[1] Keith Kahn-Harris, “Naming the Movement”, Open Democracy, 22.6.2011; Alain Badiou, “Tunisia, Egypt: The Universal Reach of Popular Uprisings”, disponible en www.lacan.com; Michael Hardt y Antonio Negri, “Arabas are the democracy”s new pioneers”, The Guardian, 24.2.2011; Paul Mason, Why It”s Kicking Off Everywhere: The New Global Revolutions, Londres 2012, p. 65.
[2] David Harvey, Spaces of Hope, Edimburgo, 2000
[3] Dans le cas de l'Allemagne, les instituions étatiques de la RDA ont pu se dissoudre facilement au sein de las foncions de gouvernement de la RFA.
[4] El terme “refolución” a été inventé par Timothy Garton Ash, en juin 1989, pour décrire les étapes initiales de reforme politique en Pologne y Hongrie y le résultat des négociations entre las autorités communistes y los leaders des mouvements populaires. Timothy Garton Ash, “Refolution, the Springtime of Two Nations”, New York Review of Books, 15.6.1989. Dans le présent texte, est utilisé le terme avec une signification clairement distinct.
[5] Asef Bayat, “Shariati and Marx: A Critique of an “Islamic” Critique of Marxism”, Alif: Journal of Comparative Poétics, no. 10, 1990.
[6] Est intéressant de noter que al-Qaida, le plus militant et violent des groupes Djihadistes, est essentiellement non révolutionnaire, dû a sa composition multinationale et a la diffusion de ses objectifs, comme “sauver l'Islam” ou “la lutte contra Occident”, et l'idée du Djihad comme une fin-en-soi. Faisal Devji, Landscapes of Jihad, Ithaca 2005.
[7] Asef Bayat, ed., Post-Islamism: The Changing Faces of Political Islam , New York, 2013
[8] Cf. aussi, Beatrice Hibou, The Force of Obedience , Cambridge 2011
[9] Ranj Alaaldin, ‘Libya: Defining its Future’, en Toby Dodge, ed., After the Arab Spring: Power Shift in the Middle East? , Londres, 2012
10 Anthony Barnett, ‘We Live in Revolutionary Times, But What Does This Mean?’, Open Democracy , 16.12.2011.

Source original: http://newleftreview.org/II/80/asef-bayat-revolution-in-bad-times

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