vendredi 29 avril 2016

Le partage de la Palestine du point de vue juridique




D'un point de vue historique les Juifs d'Europe  pouvaient éventuellement prétendre immigrer en Palestine, compte tenu de leur historiographie et des persécutions, pogroms et actes anti-juifs dont ils ont été victimes en Europe. Quand au mythe religieux qui veut que cette terre - la Palestine - considérée d'un point de vue cultuel comme étant "La terre promise", donnée par Dieu - excusez du peu - est une affirmation pour le moins abusive et qui ne peut avoir de porté juridique ou historique. En effet, Dieu est un être spirituel et ne peut, par conséquent, accorder un bien matériel
Contrairement à l'idée répandue que les Juifs (sionistes) voulaient un "Foyer juif en Palestine" - un euphémisme pour État juif - c'est un État juif à la place de la Palestine que voulait le sionisme, Theodore Herzl ne pouvait être plus clair. 
Si l'immigration juive en Palestine s'était réalisé de manière humainement acceptable, on aurait pu tenter d'en comprendre les motivations, mais au vu du comportement Sioniste depuis 1897 et de tous ses collaborateurs. (au sens de la collaboration pendant la Seconde guerre mondiale, c'est à dire, au sens le plus vil du terme.) La question de l'invalidation de la résolution 181 voté par l'ONU* le 29 novembre 1947, reste plus que jamais d'actualité et cet article revêt, en ce sens, une importance capitale pour comprendre l'illégalité de cette résolution, mais aussi les effort qu'il a fallu déployer, et cela jusqu'au aujourd’hui, pour parvenir à des ententes que l'on peut qualifier sans restriction de complots contre la Palestine.

Un des principes fondateurs de l'ONU est : "Le droit des peuples a disposer d'eux mêmes". Et comme si cela ne suffisait pas le Mandat britannique, qui devait amener les Palestiniens à l'autodétermination démocratiquement, a vendu son âme a une horde de révolutionnaires sans foi ni loi, qui pour s'emparer de la Palestine n'a pas hésité à commettre un Nettoyage ethnique. Car en effet, et ne nous y trompons pas, le sionisme à toujours instrumentalisé l'antisémitisme et n'a jamais hésité, comme cela a été le cas dans les communautés juives du Moyen-Orient, a commettre des attentats terroristes contre des Synagogues, pour que les juifs aillent grossir les rangs sionistes en Palestine.  

  


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Le partage de la Palestine du point de vue juridique
par
Henri Cattant
Conférence de Berne le 30 novembre 1970 sous les auspices d l'association Suisse-Arabe,
et a Genève le 1r. décembre 1970 à la salle d'Athènes sous les auspices du Groupe d’Études sur le Moyen-Orient
1, rue Pedro Myelan 1208 Genève 

A QUI DONC APPARTIENT LA PALESTINE ?

TABLE DES MATIERES

I. Cadre historique ..............................................................      
II. Les principes qui régissent les décisions de l'ONU ................        
III. Causes de nullité de la résolution du partage de la Palestine         
  1. L'incompétence de l'ONU.............................................      
  2. Empiètement sur la souveraineté du peuple palestinien...        
  3. Violation du Pacte de la SDN et de la Charte de l'ONU.....        
  4. Déni de justice...........................................................     
  5. Abus d'influence........................................................      
  6. Injustice flagrante du partage.....................................       
IV. Conclusion.....................................................................
        

Henry Cattan

Né à Jérusalem, licencié en droit (Faculté de Droit de l'Université de paris), LL.M. (Université de Londres), Barrister-at-law (Middle Temple).

Avocat en Palestine de 1932 à 1948, Professeur à l'Ecole de Droit de Jérusalem et membre du Palestine Law Cuncil, membre du bareau de Syrie, il a représenté les Arabes de Palestine à trois sessions des Nations Unies en 1947 et 1948.

Il est l'auteur d'ouvrages juridiques et politiques :
  • Law of Oikl Concessions in the Middle Est and North Africa.
  • Evolutin of Oil Concessions in the Middle Est and North Africa.
Deux ouvrages puibliés en 1967 par Oceana Publications, Dobbs Ferry, New York, pour Parker School of Foreing and Comparative Law, Columbia University ; Palestine, The Arabs and Israël, publié par Longmans, Londres, 1969, et Palestine, The Road to Justice, Longman, 1970.

I.

Cadre historique

Avants de discuter du point de vue juridique la résolution de l'Assemblée de l'ONU du 29 novembre 1947 concernant le partage de la Palestine, il est nécessaire de situer en quelques mots le problème dans son cadre historique. Il est aussi important de préciser  les liens exacts que les Palestiniens et les Juifs  ont eus dans le passé avec la Palestine.

La Palestine est un pays qui, de tous temps, à été habité par les Palestiniens. IL existe une fausse conception que les Palestiniens arabes ont habité le pays durant treize siècles seulement et qu'ils sont les descendants des musulmans venus de la Péninsule d'Arabie lors de la conquête musulmane du VIIe. Or, théorie est historiquement fausse. L'apport de la conquête musulmane de la Palestine a été surtout un apport en religion plutôt qu'un apport en population. La population qui vivait alors en Palestine ne fut ni déplacé, ni exterminée. Un certain nombre d'habitants embrassèrent l'Islam, mais la plupart d'entre eux, surtout les chrétiens arabes, gardèrent leur religion. Les Arabes, il faut se le rappeler, sont un peuple pré-islamique et les Palestiniens, à la différence des Hébreux qui avaient envahi la Palestine vers le XIIe. siècle avants J.-C., n'étaient pas des envahisseurs, mais les habitants autochtones du pays. Ils étaient les descendants des Cananéens, des Philistins et autres tribus qui avaient habité la terre de Canaan depuis l'aube de l'histoire. Même au sommet de l'invasion hébraïque venue d'Egypte, les Cananéens continuèrent à lutter contre les envahisseurs. Quand aux Philistins, ils ne furent jamais subjugués et continuèrent à contrôler le litoral sud du pays.

La Palestine a été le théâtre d'un grand nombre d'invasions : les Israélites, les  Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Romains, les Arabes, les Croisés et les Turcs.
A deux reprises, les Juifs habitants le pays ont été déportés ou chassées, par les Babyloniens et par les Romains ; mais, à aucun moment, les Palestiniens non juifs n'ont été déportés ou chassés de leurs pays. Cette catastrophe ne leur est arrivée que l'année 1948 de notre ère.

Une autre fausse conception, d'ailleurs très savamment répandue, est que les Juifs de nos jours sont les descendants des Hébreux qui avaient envahi la Palestine dans les temps bibliques. Cette fausse conception a été forgée par les Sionistes au début du XXe. siècle  pour donner une apparence juridique à leur revendication d'un foyer national juif en Palestine. Ils se prévalurent d'un "droit historique" sur ce pays. En droit, la revendication d'un territoire après 2000 ans ou plus sous le prétexte d'un "droit historique" est une absurdité. Il est difficile de concevoir les bouleversements qui auraient lieu dans le monde si on reconnaissait à chaque peuple le droit de revendiquer des territoires sous le prétexte d'un "droit historique", en fait, la prétentions sioniste est insoutenable - du point de vue juridique  -  pour la raison que les Juifs de nos jours ne possèdent pas de lien racial avec les Hébreux de l'antiquité.

Joseph Reinach, homme politique français d'origine israélite nous dit :
  • "Les Juifs de descendance palestinienne constituent une infime minorité. Les Juifs ont été d'aussi zélés convertisseurs que les chrétiens et les musulmans. Avant l'ère chrétienne, les Juifs avaient converti à la religion monothéiste de Moïse d'autres sémites (ou arabes), des Grecs, des Egyptiens, des Romains en grand nombre. Le prosélytisme juif ne s"'exerça pas une moindre activité par la suite, en Asie, dans tout le Nord de l'Afrique, en Italie, en Espagne, en Gaule. Les Romains et les Gaulois convertis dominaient sans doute dans les communautés juives dont il est question dans les chroniques de Grégoire de Tours. Il y avait beaucoup d'Ibères convertis par miles Juifs que Ferdinand le Catholique expulsa d'Espagne et qui se répandirent en Italie, en France, en Orient, à Smyrne. L'immense majorité des Juifs russes, polonais, galiciens, descend des Khazars, peuplade tartare du midi de la Russie qui se convertit en masse au judaïsme vers les temps de Charlemagne. Pour parler d'une race juive, il faut être ignorant ou de mauvaise foi. Il y a eu une race sémite ou arabe : il n'y a jamais eu de race juive"(1).

Il est important de souligner que, depuis la destruction de Jérusalem par Titus en l'an 70n et après la répression de la révolte juive par Hadrien en l'an 132, il restait très peu de Juifs en Palestine. Les habitants étaient des chrétiens ou des païens, mais à partir du VIIẹ siècle les musulmans et les chrétiens constituèrent les éléments principaux de la population.
         "En 1170 - 1171, Benjamin de Tudela, un pèlerin juif qui visita la Terre Sainte ne trouva que 1440 Juifs dans toute la Palestine"(2).               
Jusqu'au XXe. siècle la population juive en Palestine avait très peu augmenté. Au début du XIXe. siècle le nombre de Juifs en Palestine était de 8 000 et, en 1880, leur nombre ne dépassait pas 20 000(3). En 1918, il y avait 56 000 Juifs en Palestine (4). Le recensement de 1922 fixa leur nombre à 83 000 sur une population totale de 757 000(5).

 Cette terre de Palestrine où vivaient une petite minorité - d'ailleurs en bons termes avec les Palestiniens arabes, tant musulmans que Chrétiens - fut comme vous le savez, l'objet de la convoitise des sionistes. A l'origine, leur but était, ou paraissait être, simplement humanitaire : trouver un refuge pour les juifs voulant échapper à la persécution et à la discrimination dont ils étaient les victimes, surtout en Europe. C'était l'idée de base lancé par Théodore Herzl en 1896. Pendant la première guerre mondiale, les sionistes obtinrent du gouvernement britannique la Déclaration Balfour du 2 novembre 1917. Cette déclaration prévoyait l'établissement d'un foyer national juif en Palestine, à condition qu'il ne soit pas porté atteinte aux droits et à la position des autres parties de la population.  

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1.      Journal des Débats, 30 mars 1919, cité par Philippe de Saint Robert dans Le Jeu de la France en Méditerranée, Julliard,  1970, p. 222.
2.       Lettre du R.P. Charles T. Brigemann au Président du Conseil de Tutelle, 13 janvier 1950, Documents    Officiels de la 5e. session, supp. N°9, A/1286, p. 13.
3.       Dictionnaire Diplomatique, p. 294.
4.       Survey of Palestine, publié par le gouvernement de Palestine, Vol. I p. 144.
5.       Statistical Abstract of Palestine, oublié par le gouvernement de Palestine, 1941, p. 12.



Mais deux ans plus tard, l'article 22 du Pacte de la SDN reconnait solennellement les principes directeurs devant gouverner l'avenir de la Palestine et les autres pays arabes détachés de la Turquie à la fin de la première guerre mondiale. L'article 22 déclara qu'aux peuples habitant des territoires ayant cessé d'être sous la souveraineté des Etats qui les gouvernaient dans le passé devra s'appliquer "le principe que leur bien-être et développement forment une mission sacré de la civilisation". En outre, et visant d'une façon spéciale les communautés détachés de l'Empire Ottoman, à savoir, les peuples de Palestine, de Syrie, du Liban et de l'Irak, l'article 22 posa aussi le principe :
·         "Leur existence comme nations indépendantes peut être reconnue provisoirement sous réserve que leur soient des conseils et une assistance administrative par un mandataire jusqu'au moment où elles seront capables de se conduire seules".

Des mandants furent donc confiés par le Conseil de la Société des Nations (SDN) à certains Etats pour l'administration de quelques territoires découpés de la Turquie et de l'Allemagne à la fin de la Première guerre mondiale.
Le mandat sur la Palestine fut confié au gouvernement britannique le 24 juillet 1922. Ce mandat comportait deux objectifs principaux :
a)     l'objectif envisageait l'exécution des stipulations de l'article 22 du Pacte de la SDN lequel prévoyait qu'avec l'aide de la puissance mandataire, le pays serait mené à l'indépendance.
b)     en contradiction flagrante avec l'article 22 du Pacte, prévoyait la mise en application de la déclaration faite le 2 novembre 1917 par le gouvernement britannique en faveur de l'établissement en Palestine d'un foyer national juif.

Le premier objectif échoua piteusement. Le gouvernement britannique comme puissance mandataire s'occupa beaucoup plus à faciliter l'immigration juive en Palestine qu'à développer les institutions de libre gouvernement pouvant conduire à l'indépendance du pays. En conséquence, le pays fut gouverné par les Anglais comme une de leurs colonies sans la participation des habitants. Cela d'ailleurs convenait aux Juifs sionistes dont les ambitions avaient entretemps évolué et qui ne voulaient pas que le pays jouisse de la moindre autonomie tants qu'ils étaient en minorité. Mais le second objectif du mandat réussit pleinement et d'une façon qui dépassa même les prévisions des Sionistes. Le gouvernement britannique ouvrit les portes du pays à une immigration juive massive en dépit de l'opposition des habitants arabes. Il s'en suivit que durant un quart de siècle le nombre de juifs en Palestine s'accrut de 56 000 en 1918 à 608 000 en 1946, c'est-à-dire que la proportion des Juifs à la population totale augmenta d'un douzième à un tiers. Ainsi, avec l'aide du gouvernement britannique et contre la volonté des habitants autochtones les Sionistes réussirent à créer en Palestine un noyau démographique possédant des ambitions politiques séparatistes, mettant en danger l'intégrité territoriale du pays.

En 1939, le gouvernement britannique enfin reconnut que la continuation de l'immigration juive en Palestine portait sérieusement atteinte "aux droits et à la position" des Palestiniens, qu'il était de son devoir de préserver en vertu des termes du mandat. Aussi, publia-t-il un Livre Blanc par lequel il annonça la limitation de l'immigration juive durant les cinq prochaines années à 75 000 immigrants. Après cette période aucune immigration juive ne serait autorisée sans le consentement des Arabes. D'autre part, "étant donné qu'ils est absolument contraire à la conception des mandats, que la population de la Palestine demeure indéfiniment sous la tutelle du mandataire", le gouvernement déclara qu'il se proposait de créer des institutions autonomes et d'accorder après dix ans son indépendance à la Palestine (6).

Les Sionistes combattirent le Livre Blanc par une campagne de violence et de terrorisme dirigée contre les Anglais en Palestine dans le but d'intimider le gouvernement britannique et le forcer à rétracter la limitation qu'il avait imposé sur l'immigration juive (7).  

En 1947, la position du gouvernement britannique devenait intenable. Incapable d'autoriser la continuation de l'immigration juive en Palestine contre le gré de la majorité des habitants, tourmenté par les demandes insistantes des Sionistes pour autoriser l'immigration d'un plus grand nombre de Juifs, soumis à une forte pression de la part du gouvernement des Etats-Unis pour augmenter l'immigration juive bien que lui-même ne lui ouvrit pas ses portes, harassé par la campagne sioniste de violence, le gouvernement britannique décida éventuellement d'abandonner son mandat et de référer à l'ONU la question du gouvernement futur de la Palestine.

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(6) Cmd. 6018, publication officielle du gouvernement britannique, 17 mai 1939.
(7) Pour les détails sur cette campagne de violences, voir A Survey of Palestine, publication du gouvernement de Palestine, Vol, I, pp. 56-57 ; The British Statcment on Acts of Violence, Cmd, 5873 (1946), publication du gouvernement britannique ; S. N. Fischer, The Middle East, Routledge and Kegan Paul, 1960 p. 579 ; G. Kirk, The Middle East 1945-1950, Oxford University Press, Londres, 1954, pp. 209-213 et 218-223.


La question du gouvernement futur de la Palestine fut l'objet de discussions durant deux semaines de l'Assemblée Générale de l'ONU en 1947. Une commission spéciale nommée par cette Assemblée (UNSCOP) fut chargée d'étudier le problème. A la fin du mois d'août, cette commission présenta deux projets : un projet majoritaire et un projet minoritaire.
·         Le projet majoritaire proposait de mettre fin au mandat, de partager la Palestine et de créer un Etat Arabe, un Etat Juif et un corpus separatum pour la ville de Jérusalem qui serait soumise à un régime international administré par l'ONU. L'Etat Arabe et l'Etat Juif seraient liés par une union économique.
·         Le projet minoritaire envisageait aussi qu'il serait mis fin au mandat, mais il préconisait l'instauration d'un Etat fédéral comportant un Etat Arabe et un Etat Juif avec Jérusalem comme Capitale.



Les Arabes rejetèrent le projet de partage de la Palestine pour la raison qu'il était incompatible avec le droit et la justice ainsi qu'avec les principes démocratiques. De plus, ils contestèrent la compétence de l'ONU à pouvoir recommander le partage du pays.
Ils présentèrent diverses requêtes à l'ONU aux fins de soumettre les aspects juridiques de la question de Palestine à la Cour Internationale de Justice pour un avis consultatif, mais toutes leurs requêtes furent rejetées sous l'influence des forces politiques travaillant en faveur du partage.

Les Sionistes mobilisèrent toutes leurs forces afin d'obtenir un vote de l'ONU favorable au partage. Ils réussirent à s'assurer le concours du Président Truman qui mit le poids des Etats-Unis dans la balance en faveur du partage. Il en résulta que l'Assemblée Générale adopta le 29 novembre 1947 par 33 voix contre 13 et 10 abstentions une résolution pour le partage de la Palestine essentiellement basée sur le plan majoritaire avec certaines modifications territoriales (8).     

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(8) Résolution 181 (II). Pour une discussion concise de la question de la Palestine à l'ONU, voir L. Larry Leonard, The United Nations and Palestine, International Conciliation, 1949, pp 603-786, publié par la Fondation Carnegie pour la paix Internationale, New York.


PARTAGE DE LA PALESTINE DU POINT DE VUE JURIDIQUE

II.

Les principes qui régissent
les résolutions de l'ONU


Il existe une question préjudicielle à examiner. Quels sont les principes juridiques qui régissent les résolutions de l'ONU ? Subsidiairement, une seconde question se pose, celle de savoir si le vote des membres de l'ONU sur une résolution peut s'exercer selon un pouvoir discrétionnaire illimité, ou même d'une façon arbitraire.

 La première réponse se trouve dans la charte. L'article I prescrit que les buts de l'ONU sont, entre autres, de régler "en conformité avec les principes de la justice et du droit international" les différends internationaux et les situations pouvant mettre la paix en danger. Il faut aussi faire une bonne place aux principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées lesquels, en vertu de l'article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice, doivent être considérés comme étant une des sources du droit international. En plus, il existe divers principes qui sont soulignés dans la charte, tels que le respect pour les droits de l'homme, pour les libertés fondamentales et pour l'autodétermination des peuples.

La réponse à la deuxième question est fournie par le premier avis consultatif  exprimé par la Cour Internationale de Justice en 1948. La question posée à la Cour visait à savoir si un membre de l'ONU votant sur l'admission d'un nouveau membre en vertu de l'article 4 de la Charte pourrait faire dépendre son consentement à cette admission de conditions qui ne sont pas expressément d'une liberté de jugement, laquelle cependant devait être exercée dans le cadre des conditions de l'article 4 de la Charte, ces conditions étant les seules à prendre en considération. Par contre, la minorité décidait que la liberté du vote n'était pas circonscrite par les conditions énumérées dans l'article 4, mais pouvait être exercée dans le cadre des buts et des principes généraux de la Charte. Mais tous les membres de la Cour étaient d'accord pour souligner que le pouvoir discrétionnaire inhérent au droit de vote devait être exercé de bonne foi. Il semble utile de citer un passage de l'opinion dissidente collective de MM. Basdevant et Winiarski, Sir Arnold McNair et M Read :
  • "Un membre des Nations Unies, appelé, en vertu de l'article 4 de la Charte, à se prononcer par son vote, soit au Conseil de Sécurité, soit à l'Assemblée Générale, sur l'admission  d'un Etat possédant les qualifications prévues au paragraphe 1 de cet article, participe à une décision politique ; il est juridiquement fondé à faire dépendre son consentement à cette admission de toute considération à ses yeux pertinente, d'ordre politique. Cependant, dans l'exercice de ce pouvoir, ce Membre est juridiquement obligé de se conformer au principe de la bonne foi, de s'inspirer des Buts et des Principes des Nations Unies et d'agir d'une manière qui n'implique pas un manquement à la Charte" (9).

Cette décision concernait le vote des Etats membres sur la question de l'admission d'un nouveau membre, mais les principes qu'elle a énoncés semblent s'appliquer d'une façon générale aux votes de l'Assemblée Générale du Conseil de Sécurité.

De plus, en prenant sur elle-même en 1947 la responsabilité de décider la Question de Palestine, et de trancher les revendications contradictoires des Palestiniens et des Juifs sur ce pays, l'Assemblée Générale de l'ONU avait assumé une fonction quasi-judiciaire. Elle était, par conséquent, tenue d'observer les règles gouvernant l'exercice régulier d'une pareille fonction.
 Il s'ensuit que les résolutions de l'ONU ne peuvent pas être arbitraires et ne peuvent échapper à l'application des principes de la Charte, de la justice et du droit.

Dans la section suivante nous examinerons la résolution de partage, ainsi que les circonstances de son adoption, afin de déterminer si elle a été prise en conformité avec ces principes. 

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(9) Admission d'un Etat aux Nations Unies; Avis Consultatif, C.I.J. Recueil 1947-1948, p. 92.




III.

Causes de nullité de la résolution du partage
de la Palestine


Ni les Palestiniens, ni les Etats Arabes n'ont accepté la résolution de partage de la Palestine. Leur attitude se fonde sur des considérations d'ordre politique, historique et juridique. Ici cependant, la discussion sera limitée aux raisons d'ordre juridique qui invalident cette résolution. Ces raisons sont les suivantes.

1. Incompétence de l'ONU

La première cause de nullité de la résolution réside dans l'incompétence de l'Assemblée Générale de l'ONU à décréter, ou à recommander si l'on veut, le partage de la Palestine.

La position juridique est claire à cet égard. L'ONU est une organisation d'Etats qui a été formée pour certains buts définis dans sa Charte. A aucun moment cette organisation n'a possédé un droit de souveraineté ou autre droit quelconque sur le territoire de la Palestine. Cette organisation n'avait donc aucune qualité  pour décider du partage de la Palestine ou pour en attribuer une partie à une minorité religieuse afin d'y créer un Etat, ou pour porter atteinte aux droit politiques des habitants autochtones, ou pour céder à des émigrants étrangers des droits territoriaux ou politiques distincts et indépendants de la majorité de la population. L'ONU ne pouvait faire don de ce quelle ne possédait pas. Ni individuellement, ni collectivement, les Etats membres de l'ONU ne pouvaient aliéner, réduire ou affecter la souveraineté du peuple palestinien, ni disposer de son territoire, au moyen d'un partage ou de toute autre façon, ni détruire l'intégralité territoriale de son pays.

Non seulement l'ONU ne possédait aucune souveraineté sur la Palestine, mais elle ne possédait même pas un droit d'administration sur l'administration des mandats. Mais la dissolution de la SDN mit fin à ce droit de superposition. Ce résultat fut expressément reconnu par la résolution adopté à la dernière session de la SDN le 18 avril 1946. Cette résolution déclara que la dissolution de la SDN met fin à ses fonctions relatives aux territoires sous mandat (10).   

D'autre part, la Charte de l'ONU ne lui donnait pas un droit de supervision sur les mandats existants. En vertu de l'article 77 de la Charte, les stipulations concernant la tutelle ne s'appliquent pas aux mandats, sauf si des accords de tutelle sont conclus avec le mandataire.
Pour Duncan Hall :
  • "Dans le cas des mandats, la SDN est décédée sans testament... Il n'y a pas eu de transfert de souveraineté aux Nations Unies... La souveraineté, en quelque lieu qu'elle se trouve, ne réside pas dans les Nations Unies" (11)

  • Aussi, la Sous-commission 2 à la Commission ad hoc de l'ONU chargée de la question palestinienne déclara-t-elle dans son rapport :
  • "... il faut souligner que l'Organisation des Nations Unies n'a hérité ni des fonctions, ni des pouvoirs constitutionnels et politiques, de la SDN ; qu'on ne peut en aucune façon la considérer comme le successeur de la SDN en ce qui concerne l'admission des mandats..." (12) 

  • En 1947, les Arabes soulevèrent la question de l'incompétence de l'ONU à recommander le partage de la Palestine. La Sous-commission 2 précitée accepta cet argument et déclara dons son rapport :
  • "16, L'étude du Chapitre XII de la Charte des Nations Unies établit clairement que ni l'Assemblée Générale, ni aucun autre organe des Nations Unies, n'est compétent pour envisager et moins encore pour recommander ou imposer une solution quelconque pour un territoire sous mandat... et que l'établissement du gouvernement futur de la Palestine est un problème qui relève uniquement du Peuple de la Palestine... En outre, le partage implique une aliénation de territoire et la destruction de l'intégrité territoriale de l'Etat de Palestine. Les Nations Unies ne peuvent disposer d'un territoire ou l'aliéner. Elles ne peuvent pas non plus priver la majorité de la population de son territoire ni le consacrer à l'usage exclusif d'une minorité" (13).  

Mais l'Assemblée Générale passa outre et ne tint aucun compte de l'argument relatif à son incompétence.

(10)  Vingt et unième session ordinaire de l'Assemblée de la SDN Document A 33, 1946, pp. 5-6.
(11)  H. Duncan, Madates, Dependencies and Trusteeships, Carnegie Endowment for peace, Wuashington, 1948, p. 274.
(12)  Rapport de la Sous-commission 2 à la Commission ad hoc chargée de la question palestinienne, Document A/AC. 14/32, 11 novembre 1947, p. 276.
(13)  Ibid., pp. 276, 277, 278.

Il est à remarquer que l'article 10 de la Charte permet à l'Assemblée Générale de discuter toutes questions ou affaires rentrant dans le cadre de la Charte et de formuler des recommandations aux membres de l'ONU et au Conseil de sécurité. Seulement, comme l'a dit la Sous-commission 2, les Nations Unies ne peuvent se déclarer compétentes en ce qui concerne les territoires sous mandat que si l'on substitue des accords de tutelle à la place des mandats. Or, ce n'était pas le cas pour la Palestine. De toute façon, même si on reconnait que l'Assemblée Générale avait le droit, en vertu de l'article 10, de discuter de la question de la Palestine, et de faire des recommandations à son sujet, cela ne l'habilitait pas à faire des recommandations incompatibles avec les droits fondamentaux du peuple palestinien ou a prescrire la forme du gouvernement futur de la Palestine. Une telle recommandation ne possède pas de valeur juridique ou de force obligatoire. L'Assemblée Générale a même été jusqu'à prévoir la création d'une commission pour l'administration de la Palestine pour une période transitoire (14), ce qui constituait un excès d'autorité.

Certains auteurs on reconnu l'invalidité de la résolution de partage en raison de l'incompétence de l'ONU.
P.B. Potter dit :
  • "Les Nations Unies n'ont pas le droit de dicter une solution en Palestine, à moins qu'on puisse trouver une base pour l'exercice de ce pouvoir. Mais on n'a pas encore trouvé cette base.
  • On pourrait trouver cette base en prétendant que la souveraineté sur la Palestine à laquelle la Turquie à renoncé par le Traité de Lausanne a passé à la SDN, et que l'ONU en a hérité. C'est une proposition qui comporte deux pas hasardeux. Ou bien on pourrait prétendre que le mandat est encore en vigueur et que sa que superposition est passé à l'ONU, ce qui serait plus réaliste mais encore assez hasardeux au point de vue juridique. Les Arabes nient que le mandat possède maintenant une force obligatoire, ou même qu'il ait possédé une telle force dans le passé, comme ils nient aussi la validité de la Déclaration Balfour sur laquelle le mandat était basé. Encore une fois, ils ont probablement raison au point de vue juridique". (15)
·         Quicy Wright a exprimé l'opinion que :
·         "La légalité de la recommandation de l'Assemblée Générale pour la partage de la Palestine est douteuse" (16).
·         De même I. Brownlie écrit :
·         "Il est douteux que les Nations Unies possèdent le pouvoir pour transférer un titre, entre autres raisons, parce que l'Organisation ne peut assumer le rôle de souverain territorial... Ainsi la résolution de 1947 prévoyant un plant de partage pour la Palestine constituait probablement un excès de pouvoir. Et même si la résolution ne constituait pas un excès d pouvoir, de toute façon elle ne  liait pas les Etats membres" (17).

(14)  1ere Partie, B2 de la résolution 181 (II) du 29 novembre 1947.
(15)  Pitman B. Potter, The Palestine Problem before the United Nations, American Journal of International Law 1948, Vol. 42 p. 860
(16)   The Middle East  Crisis, edited by John W. Haldeman, Oceana, Dobbs Ferry, 1969, p. 12.
(17)  I. Brownlie, Principles of Public International Law, Clarenton Press, Oxford, 1966, pp. 12.


PARTAGE DE LA PALESTINE DU POINT DE VUE JURIDIQUE
Causes de nullité de la résolution du partage
de la Palestine

2. Empiétement sur la souveraineté du peuple palestinien (18)

En raison des vicissitudes que la Palestine a subies durant les cinquante dernières années, et principalement en raison du démembrement de l'Empire Ottoman à la fin de la première guerre mondiale, il semble nécessaire en premier lieu de parler brièvement de la question de souveraineté sur la Palestine.

Avant l'occupation de la Palestine en 1917-1918 au cours de la première guerre mondiale, la Palestine formait une partie intégrante de la Turquie. Les habitants de la Palestine, Musulmans, Chrétiens et Juifs, jouissaient de droits égaux avec les Turcs. La constitution turque ne faisait aucune discrimination entre Turcs et Arabes ou entre Musulmans, Chrétiens et Juifs. Les Turcs et les Arabes partageaient la souveraineté sur tous les territoires de l'Empire Ottoman sans distinction entre provinces turques ou provinces arabes. Cette situation demeura jusqu'au détachement des provinces arabes de la Turquie à la fin de la première guerre mondiale.

L'occupation militaire britannique de la Palestine en 1917-1918 ne conféra aucun droit de souveraineté à la puissance occupante et ne priva pas le peuple palestinien de sa souveraineté. A part le fait que le droit international moderne ne reconnait pas se souveraineté à la l'occupant, l'objectif déclaré des Puissances Alliés durant la guerre n'était pas l'acquisition de territoires au Moyen-Orient. Cela ressortait d'une façon évidente des assurances et des promesses faites alors aux Arabes par les puissances Alliés concernant leur indépendance éventuelle de la Turquie.

Le Pacte de la SDN écarta aussi toute idée d'annexion du territoire de la Palestine, ainsi que d'autres territoires arabes et, comme nous l'avons déjà remarqué, il reconnut l'existence du peuple palestinien et aussi de certains autres peuples détachés de la Turquie "comme nations indépendantes".
Duncan Hall  remarque :
  • "La présomption d'une souveraineté nationale indépendante pour les mandats est la base de l'article 22. Les rédacteurs du Pacte prirent comme leur point de départ les notions générales de non-annexion et d'autodétermination"(19).

Il est à remarquer que la renonciation par la Turquie à sa souveraineté sur les pays arabes en vertu de l'article 16 du Traité de Lausanne du 24 juillet 1923 n'avait été faite ni en faveur des Etats signataires, ni en faveur d'aucune autre puissance. Cela fait contraste avec la renonciation à la souveraineté sur certaines îles en faveur de l'Italie en vertu de l'article 15 du même Traité. Cette différence s'explique par le fait que les peuples qui habitaient les provinces arabes détachés de la Turquie possédaient déjà le droit de souveraineté sur leurs propres pays et n'avaient pas besoin d'une renonciation en leur faveur, contrairement à l'Italie qui ne pouvait acquérir de souveraineté sur les îles qu'elle obtenait de la Turquie sans une renonciation de souveraineté en sa faveur de la part de cette dernière.    

(18)  En ce qui concerne la question de souveraineté  sur la Palestine, voir Henry Cattan, Palestine, The Arabs and Israël, Longmans, Londres, 1969, pp.242-275.
(19)  H. Duncan Hall, op. cit., p. 80.



L'effet juridique selon le droit international du détachement de la Palestine de l'Empire Ottoman et de la reconnaissance de la SDN du peuple palestinien comme nation indépendante était de constituer la Palestine en une entité politique indépendante et séparée de la Turquie. Le peuple palestinien devenait ainsi un sujet de droit international investi d'une souveraineté légale sur son territoire.

Il reste à voir maintenant si le mandat britannique à privé le peuple palestinien de cette souveraineté. On a beaucoup discuté pour savoir où réside la souveraineté dans les pays sous mandat. Certains ont prétendu que la souveraineté résidait dans les principales Puissances Alliés (20) ou dans la SDN (21) ou dans le mandataire (22) ou conjointement dans la SDN et le mandataire (23) ou dans les habitants du territoire sous mandat (24). Toutes les opinions émises à cet égard - sauf celle qui reconnait la souveraineté aux habitants du pays sous mandat - ont été rejetées ou discréditées.
Van Rees, le Vice-président de la Commission Permanente des Mandats; à résumé la position en ces termes :
  • "Enfin, un dernier groupe d'auteurs - divisé en deux fractions - le seul groupe qui à tenu compte du ^principe de non annexion adopté par la Conférence de la Paix, soutient que les auteurs du Pacte ont voulu tenir en suspens ou bien la souveraineté elle-même sur les territoires sous mandat pour une période équivalente à la durée des mandats respectifs (Lee D. Campbell, The Mandate for Mésopotamie and the Principle of trustership in English law, p. 19 ; A. Mendelssohn Bartholdi, Les Mandats Africains (traduction), Archiv für Politk und Geschichte, Hambourg, 1925) ou bien l'exercice des pouvoirs souverains dont furent provisoirement chargés certaines nations en qualité de tuteurs. D'après ce dernier point de vue la souveraineté elle-même serait détenue, depuis la renonciation des anciens Empires, par les communautés et les populations autochtones des différents territoires. En d'autres termes, les anciens Empires ayant renoncé à leurs droits en titres sur les territoires en question sans qu'il y ait eu transfert de ces droits et titres à d'autres Puissances, la souveraineté, qui appartient à ces divers peuples et communautés jusqu'au moment de leur soumission à l'Allemagne et à la Turquie, renaît automatiquement du fait de la renonciation susdite. (Paul Pic, Le régime  des Mandats d'après le Traité de Versailles, RGDIP, Paris, 1923, p. 14 ; ALbert Millot, Les mandats internationaux, Paris, 1924, pp. 114-118 ; J. Stoyanovski, La Théorie générale des mandats internationaux, Paris, pp 83 et 86). (25) 

(20) Haijer, Le Pacte de la Société des Nation, 1926, Spes, Paris, p. 374
(21)  RedsIob, Le Système des Mandats Internationaux, p. 196
(22)  H. Rolin, Le Système des Mandants Internationaux, Revue de Droit INternational et de Législation Comparée, 1920, p. 302
(23)  Quincy Wright, Sovercignty of the Mandats, American Jounal of International Law, 1923, p. 698.
(24)  P. Pic, Le Régime du Mandat d'après le Traité de Versailles, Revue Générale de Droit International Public, Vol 30, 1923, p. 934 ; Millot, Les Mandats Internationaux, p. 91 ; Stoyanovky, La Théorie Générale des Mandats Internationaux, p. 92.
(25)  D.F.W. Van Recs, Les Mandats INternationaux, Rousseau, Paris 1927 p.20


D'ailleurs, le principe que la souveraineté réside dans le peuple du pays sous mandat a été appliqué récemment par la Cour de Cassation italienne en ce qui concerne un pays sous tutelle. (26)

On peut donc conclure que le mandat britannique sur la Palestine n'a pas privé le peuple palestinien de sa souveraineté. Durant le mandat, l'exercice de cette souveraineté était suspendu, ou plutôt restreint, par les pouvoirs d'administration accordés à la puissance mandataire. Mais à la dissolution de la SDN, les pouvoirs d'administration du mandataire prirent fin en raison du fait que le mandat lui-même cessa d'exister. Dès lors, par suite de la levée de cette restriction, le peuple palestinien recouvra l'exercice de sa pleine souveraineté et devint libre de se gouverner lui-même et de déterminer son propre destin selon les principes et les procédures démocratiques.

Il s'ensuit que la résolution de l'Assemblée Générale de l'ONU qui décida le partage de la Palestine en trois territoires, un pour un Etat Arabe, un second pour un Etat Juif, et un troisième pour la ville de Jérusalem, constituait un empiétement sur la souveraineté du peuple palestinien. La résolution de partage ne pouvait acquérir de valeur au point de vue juridique que si elle entérinée par un plébiscite du peuple palestinien. Or, la majorité du peuple palestinien avait proclamé sans équivoque son opposition au partage et dès lors l'Assemblée Générale ne possédait aucun droit d'aller à l'encontre de sa volonté et de ses aspirations.
La souveraineté est, selon les termes de la Constitution Française du 3 septembre 1791, "une, indivisible, inaliénable et imprescriptible". En application de ce principe de portée universelle, on est forcé d'admettre que le peuple palestinien conserve même aujourd'hui sa souveraineté sur tout le territoire de la Palestine, malgré son partage et malgré son occupation.    


L'empiétement sur la souveraineté du peuple palestinien n'est pas seulement contraire aux principes du droit mais il constitue aussi une infraction à la règle posée par l'article 2 (7) de la Charte. Cette règle met les affaires relevant de la compétence nationale de chaque Etat à l'abri de toute intervention de la part de l'ONU. Bien qu'en 1947 la Palestine était alors un Etat assujetti provisoirement à un mandat, lequel d'ailleurs arrivait à la fin et de toute façon n'affectait pas sa souveraineté, la question de son gouvernement futur relevait exclusivement de sa compétence nationale. Ainsi les recommandations faites en 1947 par l'Assemblée Générale concernant le gouvernement futur de la Palestine et le partage du pays constitueraient non seulement une atteinte à la souveraineté du peuple palestinien, mais aussi une intervention injustifiée dans une affaire qui relevait exclusivement de sa compétence nationale.

 (26) Società ABC v. Fontana and Della Rocca, International Law Reports, 1955, Vol. 22, p. 77.


A qui donc appartient la Palestine 04



PARTAGE DE LA PALESTINE DU POINT DE VUE JURIDIQUE
Causes de nullité de la résolution du partage
de la Palestine

3. Violation du Pacte de la SDN et de la Charte de l'ONU

La troisième raison d'invalidité de la résolution de partage est qu'elle va à l'encontre des principes de l'article 22 du Pacte de la SDN et de la Charte de l'ONU.

L'infraction de la résolution à l'esprit et à la lettre de l'article 22 du Pacte de la SDN apparait dans le rapport établi par la Sous-commission 2 de la Commission ad hoc  de l'ONU en date du 11 novembre 1947 :
  • "En vertu de l'article 22 du Pacte, la Palestine devait devenir une nation entièrement indépendante dès la fin de la limitation temporaire à l'exercice de sa souveraineté nationale par le mandat.
  • "Les dispositions prévoyant l'établissement d'un foyer national juif en Palestine n'infirment en aucune façon la conclusion ci-dessus. Les rédacteurs du mandat n'entendaient pas et ne pouvaient pas entendre que l'immigration juive en Palestine entraînât un démembrement de la structure politique, géographique et administrative du pays. Toute autre interprétation équivaudrait à une violation des principes du Pacte et réduirait à néant un des buts principaux du mandat.
  • "En conséquence, en dehors d'autres graves objections d'ordre politique, économique et moral, la proposition de partage de la Palestine formulé par la majorité de la Commission Spéciale, est contraire aux dispositions particulières du mandat sur la Palestine et directement contraire aux principes et aux buts du Pacte". (27)  

De même, le partage de la Palestine viole les principes de la Charte des Nations Unies, et cela pour deux raisons.

D'une part, les Nations Unies sont tenues, en vertu de l'article 1 de la Charte, de respecter le droit des peuples "à disposer d'eux-mêmes". Article 73, relatif aux territoires non-autonomes et aux territoires placés sous mandat, impose aux Nations Unies l'obligation "de tenir compte des aspirations politiques des populations". Imposer le partage de la Palestine, contrairement à la volonté de la majorité de sa population, constitue une violation évidente de la Charte.

D'autre part, la Charte indique dans l'article 1 que l'un de ses buts est de "promouvoir et d'encourager le respect pour les droit de l'homme et pour les libertés fondamentales pour tous sans distinction de race, sexe, langue ou religion". L'acte de partager la Palestine et d'attribuer une partie de son territoire à une minorité religieuse constitue-t-il un respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales de la majorité de la population ?

On pourrait prétendre que l'existence d'une minorité juive modifiait la situation. La réponse est évidente. Quel pays dans le monde ne possède pas une minorité raciale ou religieuse ? Nulle part ne reconnaît-on le démembrement du pays comme étant un procédé légitime pour garantir les droits d'une minorité.

(27)  Document de l'ONU  A/AC. 14/32, 11 novembre 1947.   



4. Déni de justice

A plusieurs reprises, avant le vote de l'Assemblée Générale de l'ONU en 1947 sur le projet du partage, les Etats Arabes proposèrent que l'avis consultatif de la Cour Internationale de Justice soit demandé sur certaines questions juridiques touchant la question de la Palestine, et en particulier sur la compétence de l'ONU à recommander le partage. Mais les forces politiques qui œuvraient en faveur du partage ne voulaient pas que leurs efforts soient gênés par une décision défavorable de la Cour et, en conséquence, elles réussirent à faire rejeter toutes ces requêtes. (28)  

(28)  Pour les rejets de requêtes pour un avis consultatifs, voir documents de l'ONU  A/AC. 14/21, 14 octobre 1947 ; A/AC. 14/24, 16 octobre 1947 ; A/AC. 14/25, 16 octobre 1947 et A/AC. 14/32, 11 novembre 1947.  Voir en particulier Documents Officiels de la 2e. session de l'Assemblée Générale, Commissions ad  hoc  chargée de la Question Palestinienne, pp. 203 et suiv.

Malgré cette attitude négative, la Sous-commission 2 proposé à la Commissions Ad hoc proposa dans son rapport du 11 novembre 1947 que certaines questions soient soumises à la Cour Internationale avant que l'Assemblée Générale entreprenne de faire des recommandations sur le fond du problème. Ces questions étaient les suivantes :
a)     Si la population autochtone de Palestine n'a pas un droit naturel sur la Palestine et s'il ne lui appartient pas d'en déterminer la constitution et le gouvernement futur ;
b)     Si les garanties et assurances données par la Grande Bretagne aux Arabes durant la première guerre mondiale (y compris la Déclaration franco-anglaise de 1918) concernant l'indépendance et l'avenir des pays arabes à la fin de la guerre, ne comprenaient pas la Palestine ;
c)     Si la Déclaration Balfour, qui à été faite à l'insu et sans le consentement de la population autochtone de la Palestine, était valable et obligatoire pour le peuple de Palestine, ou compatible avec les garanties et les assurances antérieures et postérieures données aux Arabes ;
d)     Si les stipulations du Mandat sur la Palestine concernant la fondation d'un foyer national juif en Palestine sont en harmonie et en accord avec les buts et les dispositions du Pacte de la Société des Nations (en particulier avec l'article 22) ou avec les dispositions du Mandat relatives à l'évolution vers l'autonomie et à la préservation des droits et de la situation des Arabes de Palestine ;
e)     Si la dissolution de la Société des Nations n'a pas fait disparaître le fondement juridique sur lequel repose le mandat pour la Palestine, et si la Puissance mandataire n'a pas le devoir de remettre ses pouvoirs politiques et administratif à un gouvernement de Palestine représentant la population légitime de la Palestine ;
f)       Si un plan de partage de la Palestine sans le consentement de la majorité de son peuple est compatible avec les buts du Pacte de la Société des Nations et avec les stipulations du Mandat pour la Palestine ;
g)     Si les Nations Unies jouissent de la compétence nécessaire pour recommander l'un ou l'autre des plans de la majorité ou de la minorité de la Commission spéciale des Nations Unies pour la Palestine et les recommandations y annexées, ou tout autre solution comportant la division du territoire de la Palestine, ou un mandat permanent sur une ville ou région quelconque de la Palestine, sans le consentement de la majorité du peuple de la Palestine ;
h)     Si les Nation Unies  ou l'un quelconque de ses Etats Membres sont compétents pour appliquer, ou recommander d'appliquer, toute proposition concernant la constitution et le gouvernement futurs de la Palestine, en particulier tout plan de partage qui serait contraire aux vœux, ou adopté sans le consentement des habitants de la Palestine. (29)  

Le recours à la Cour Internationale de Justice recommandée par la Sous-commission 2  fut rejeté par la Commission ad hoc le 24 novembre 1947 par 25 voix contre 18, mais en ce qui concerne la question de la compétence de l'ONU à recommander le partage le rejet fut par 21 vois contre 20.

Pitman Potter considère que le rejet des requêtes arabes pour porter devant la Cour Internationale la question de la compétence de l'ONU dans l'affaire de Palestine "tend à confirmer qu'on a esquivé le droit international" (30) Mais on n'a pas seulement esquivé le Droit International. Selon les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisés, le refus de l'ONU en 1947 de permettre l'examen des aspects juridiques de la Question de Palestine par la Cour Internationale de Justice constituait un déni de justice dont l'effet est de priver la résolution de partage de toute valeur morale ou juridique.

(29) Document A/AC. 14/32, 11 novembre 1947.
(30)  Pitman B. Potter, The Palestine Problem before und Unitet Nations, American Amarican Journal of Intyernational Law, Vol 42, 1948, p. 860.




5. Abus d'influence

Ce n'est un secret pour personne que la résolution du partage de la Palestine à été obtenue par l'influence sioniste et par des pressions politiques américaines. Les Sionistes avaient gagné à leur cause le Président Truman ainsi que beaucoup de hauts fonctionnaires du gouvernement américain. Dans ses Mémoires, le Président Truman reconnaît que "non seulement les Nations Unies étaient soumises à des pressions telles qu'elles n'en avaient jamais connues, mais la Maison Blanche, elle aussi subissait un véritable tir de barrage... Certains des dirigeants sionistes suggéraient que nous fissions usage de notyre influence pour amener des nations souveraines à voter favorablement à l'Assemblée Générale". (31)    

  • Or, l'influence américaine a beaucoup joué pour faire adopter par l'ONU le partage de la Palestine. Les preuves ne manquent pas. Il était devenu bien clair quelques jours avant le vote définitif que le plan de partage n'aurait pas la majorité de deux tiers requise pour son adoption. Plusieurs pays s'étaient ouvertement déclarés contre le partage ou s'étaient abstenus en commission. Ainsi, le général Carlos Romulo, représentant des Philippines, déclarait qu'il défendrait "les droits primordiaux d'un peuple à déterminer son avenir politique et à préserver l'intégrité territoriale de son pays natal". (32) Mais il devait bientôt changer d'avis, ainsi que beaucoup d'autres, car les pressions se firent sentir.
  • Dès lors, par intimidation plus souvent que par persuasion, les représentants des Etats-Unis à l'ONU insistèrent auprès de chaque délégation sur la nécessité de prendre une "attitude positive". C'est ainsi que la Belgique, la France, Haïti, le Libéria, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Nouvelle Zélande, le Paraguay et les Philippines, ont dû réviser leur vote au moment de la séance plénière" (33)
  • Ecoutons maintenant les témoignages des Américains.
  • Kermit Roosevelt a écrit :
  • "Notre délégation s'était déclaré en faveur du plan de partage... Après cette décision, elle adopta le principe que les autres pays devraient être libres à décider la voie qu'ils veulent suivre... Cependant, ce principe fut modifié lorsqu'il est apparu que, s'il était suivi, le plan de partage échouerait" (34)

  • Un témoin de poids est James Forestal, alors secrétaire américain à la défense. Son journal abonde en renseignements au sujet des manœuvres destinés à assurer un vote favorable au partage.  Ila écrit :
  • "Il y avait un sentiment chez les Juifs que les Etats-Unis ne faisaient pas ce qu'ils pouvaient pour solliciter des votes à l'Assemblée Générale de l'ONU en faveur du partage de la Palestine. J'ai pensée que les méthodes qui avaient été utilisées  par des personnes ne dehors de la branche exécutive du gouvernement pour exercer une coercition et une contrainte sur d'autres nations à l'Assemblée Générale frisaient de près le scandale". (35)


Sumner Welles, ancien secrétaire d'Etat américain, jette aussi beaucoup de lumière sur la pression exercée par la Maisons Blanche en 1947 pour faire adopter la résolution en faveur du partage. Il dit :
  • "L'appui des Juifs au Projet du partage devint écrasant. Dans plusieurs des grandes cités américaines l'influence politique de ce groupe de citoyens américains était considérable et leur allégeance constituait plus qu'un intérêt transitoire pour un Président dont l'ambition de se faire réelire était bien connue". (36)

  • Et puis il ajoute :
  • "Lorsque le projet de partage fut finalement présenté en session plénière de l'Assemblée Générale le 26 novembre, le seul résultat parut soudain incertain. D'après les dispositions de la Charte et les règlements de l'Assemblée une majorité de deux tiers était requise pour son adoption. Il était connu qu'entre les républiques latino-américaines Cuba était inflexible dans son opposition. Il était aussi connu que l'Argentine, la Colombie, le Mexique, s'abstiendront de voter, et que certaines autres républiques, notamment Haïti, le Salvador et le Honduras, étaient peu enclins à prendre une position définie...

"A la lumière des événements qui suivirent, il est important qu'il n'y ait aucun malentendu sur l'attitude que les Etats Unis ont adopté en cette conjoncture. Par ordre direct de la Maison Blanche toute forme de pression, directe et indirecte, a été employée par des officiels américains contre les pays en dehors du monde musulman qui étaient connus pour être incertains ou opposés au partage. Des représentants ou des intermédiaires furent employés par la Maison Blanche afin d'assurer la majorité requise". (37)


Stephen Penrose, l'ancien président de l'université américaine à Beyrouth, à écrit :
  • "Il ne pourrait y avoir de doute que c'est la pression américaine qui assura l'acceptation de la recommandation pour le partage de la Palestine le 29 novembre 1947" (39)

Quelle est la valeur, au point de vue juridique, d'une résolution qui n'a été obtenue que par l'usage de pressions politiques constituant sans aucun doute un abus d'influence ? Pitman Potter a exprimé l'opinion que "les Etats-Unis sont arrivés bien près à exercer un abus d'influence pour obtenir l'adoption du plan de partage". (39)
Il semble cependant que l'abus d'influence est suffisamment démontré et que, sans cet abus d'influence, la résolution de partage n'aurait pas été adoptée. Ici aussi il y a lieu d'appliquer les principes généraux du droit reconnus par les nations civilisés ainsi que la jurisprudence de la Cour Internationale concernant l'obligation pour les membres de l'ONU de se conformer dans l'exercice de leur vote au principe de la bonne foi. L'application de ces principes conduit à l'invalidation de la résolution pour abus d'influence.  

(31) Harry Truman, Mémoires, Paris, Plon, 1956, tome II, p. 192.
(32)  Séances Plénières de l'Assemblée Générale, 1947, Vol. II, p. 1426.
(33)  La question Palestinienne, Colloque de Juristes Arabes, Alger 22-27 juillet 1967.
(34)  Kermit Roosevelt, The partition of Palestine : A Lasson in Preseure Politics, Middle East Journal, 1948, pp. 13-14.
(35)  The Forrested Diaries, Viking Press, New York, 1951, pp. 945, 363.
(36)  Summer Welles, We Need Not Fail, Houghton Mifflin, Boston, 1948, p. 80.
(37)  Sumner Welles, op. cit., p. 63.
(38)  Stephen Penrose, The Palestine Problem ; Retrospect and Prospect, American Friends of Middle East, New York, p. 10.
(39)  Pitman B. Potter, The Palestine Problem before the United Nations, Américan Journal of International Law, 1948, Vol. 42 p. 861.




PARTAGE DE LA PALESTINE DU POINT DE VUE JURIDIQUE
Causes de nullité de la résolution du partage
de la Palestine


6. Injustice flagrante du partage

Est-il nécessaire que les résolutions de l'ONU soient justes ? La réponse se trouve dans l'article 1 de la Charte des Nations Unies lequel prescrit, comme nous l'avons déjà remarqué, que l'organisation mondiale doit agir "en conformité avec les principes de la justice et du droit international". Il est significatif de noter que la Charte mentionne les principes de justice avant les principes de droit international comme si elle voulait accorder la priorité aux principes de justice sur les principes de droit international. La notion de justice n'est pas un concept vague et ne doit pas être confondue avec le droit international. Comme P.E. Corbett l'a remarqué :
  • "Si nous jugeons par les termes de l'article 1 d la Charte, les "principes de justice" représentent quelque chose de distinct du "droit international" " (40)

La notion de justice est universelle, et, à la différence du droit international, elle est moins sujette à des divergences d'interprétation. La notion de justice introduit sur le plan international une échelle de valeurs morales et éthiques qui ne sont pas clairement en évidence dans la sphère du droit international. Il s'en suit que le respect et l'observance des principes de justice constituent un test essentiel de la validité de la résolution du partage.

Voyons si l'Assemblée Générale de l'ONU a observé dans sa résolution du partage le principe de justice prescrit par la charte. Afin de pouvoir répondre à cette question, il faudrait rappeler les faits.

En 1946, la population totale de la Palestine comprenait 1 972 000 habitants, dont 1 203 000 Musulmans, 145 000 Chrétiens et 608 000 Juifs. (41) Un dixième seulement des Juifs qui vivaient alors en Palestine étaient des habitants autochtones du pays. Le reste de la population juive était composé surtout d'immigrants étrangers d'origine polonaise, russe ou d'Europe Centrale (42), un tiers d'entre eux seulement ayant acquis la nationalité palestinienne. (43) Selon les statiques rurales du gouvernement de la Palestine, la population juive possédait, en Palestine, compte non tenue de la propriété urbaine, 1 491 699 dunoms (44) de terres sur un total de 26 323 023 dunoms représentant la superficie totale de la Palestine. (45)  Ainsi les Juifs possédaient 5,66 % de la surface totale du pays. Par contre, les Arabes possédaient 12 574 774 dunoms, c'est ç dire 47,77% de la superficie du pays. Le reste comprenait le domaine public. -C'est à dire à l'Etat palestinien-

Que fit le projet de partage adopté par l'ONU en 1947 ?
IL attribua aux Juifs - qui étaient moins d'un tiers de la population et possédaient moins de 6% de la terre - une superficie dépassant 14 500 kilomètres carrés, ce qui représentait 57% de la superficie de la Palestine, c'est à dire un territoire presque dix fois plus grand que la superficie possédée par les Juifs dans toute la Palestine. De plus , le parties attribuées à l'Etat Juif comprenait la plaine du littoral s'étendant de St-Jean d'Acre à Isdud et les terres les plus fertiles de la Palestine, tandis qu'on laissait aux palestiniens surtout les région montagneuses et stériles. En fait, ce partage n'en était guerre un, car l'ONU donnait aux immigrants juifs le gâteau, et aux Palestiniens les miettes. En d'autres termes, ce n'était un partage, mais une spoliation pure et simple. Son iniquité saute aux yeux.

L'iniquité, je dirais même l'extravagance, de la résolution devient encore plus frappante lorsqu'on réalise que l'Etat Juif tel que l'ONU l'avait proposé en 1947 comprenait une majorité arabe, c'est à dire 509 000 Arabes contre 499 000 Juifs. (46) Mais, comme le monde le réalise, les Israéliens se sont bien chargés en 1948 d'éloigner cette majorité arabe et d'en faire des réfugiés, sans terres, ni foyers.

(40)  P.E. Corbett, Law and Society in the Relations of States, Harcourt, New York, 1951, p. 268.
(41)  Document de l'ONU A/AC. 14/32, 11 novembre, p. 904.
(42)  Statistical Abstract 1944-1945,  publié par le gouvernemnet de Palestine p. 42.
(43)  Ibid, pp. 36 et 46.
(44)  Un dunum égale 1000 mètres carrés
(45)  Annexe VI au document de l'ONU A/AC. 14/32, 11 novembre 1947, p. 907. En d'autres termes, les Juifs possédaient une superficie de 1491 kilomètres carrés sur une superficie totale de 26 323 kilomètres carrés.
(46)  Document de l'ONU A/AC. 14/32, 11 novembre 1947, p. 291.

Pour compléter le tableau, j'ajouterais une observation. Le projet de partage prévu par la résolution de l'ONU, aussi injuste et inique qu'il était, fut emporté par le cours des événements en 1948, et une situation inconcevablement plus injuste et plus inique fut créée. Un Etat sioniste et raciste - qui n'avait rien en commun avec le territoire, la population ou la structure politique de l'Etat Juif envisagé par la résolution du partage - avait surgi et était bien décidé à se maintenir par la force des armes. Les Israéliens chassèrent un million de Palestiniens de leurs foyers. Le nombre de refugiés a augmenté depuis. A l'heure actuelle, il n'est pas loin de deux millions. En outre, ils dépassèrent les limites de l'Etat Juif prévu par la résolution du partage et occupèrent une grande partie du territoire réservé par la résolution à l'Etat Arabe. Au total, les israéliens occupèrent en 1948 et 1949 une superficie de 20 850 kilomètres carrés (47) d'un total de 26 323 kilomètres carrés représentant la superficie de la Palestine, ce qui laissait aux Palestiniens un cinquième de leur patrie. Il va sans dire que les événements de 1967 on encore aggravé la situation, car les Israéliens occupent maintenant tout le territoire de la Palestine, ainsi que des territoires appartenant aux Etats voisins.

(47)  Voir Gouvernment Year-Book, publié par le gouvernement israélien, édition anglaise, 5712 (1951-1952), p. 315.



IV.

Conclusion


Il reste maintenant à considérer deux points : les conséquences juridiques des causes d'invalidité de la résolution de partage et leur portée pratique.

Pour ce qui est des conséquences des causes d'invalidité dont nous avons donné un aperçu, il semble évident quelles vicient la résolution de partage laquelle devrait, par conséquent, être considérée comme étant nulle tout simplement. Cette résolution est essentiellement une décision politique qui a été conçue, façonnée et adoptée grâce aux efforts combinés des Juifs sionistes et de certains hommes politiques américains en violation des principes du droit, de la, justice et de la démocratie.

Il s'ensuit de la nullité de la résolution qu'elle ne pourrait servir comme titre juridique pour la création ou le maintien d'un Etat Juif en Palestine ou pour l'acquisition par cet Etat d'un droit de souveraineté sur le territoire de la Palestine. En d'autres termes, la résolution de partage ne pourrait être considérée comme constitutive de droits en faveur des Juifs lésant les légitimes des Palestiniens.

Cette conclusion affecte les assises juridiques de l'Etat d'Israël. La proclamation de l'établissement de cet Etat faite le 14 mai 1948 reposait sur deux points : le "droit naturel et historique " des Juifs et la "résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies". Or comme nous l'avons vu, ces deux fondements n'ont aucune base juridique valable.


Mais quelle est la portée pratique de cet examen juridique de la question ?
Une situation de fait a été établie en Palestine, par la force, et en violation du droit et de justice. L'Etat qui s'y est établi, armé jusqu'au dents, est bien décidé à conserver ses conquêtes territoriales et a refuser aux Palestiniens leur retour à leurs foyers. Cette situation demeure explosive et sans solutions, en dépit des années qui s'écoulent. Il ne semble pas cependant que l'examen juridique de la Question de Palestine ait une valeur simplement théorique ou historique. Si les problèmes politiques ne sont pas toujours résolus à la lumière de principes équitables et juridiques, néanmoins les conclusions auxquelles on parvient à la suite de l'examen de la question ont une double utilité:
  • D'une part, elles permettent une meilleure compréhension du fond du problème, une plus profonde réalisation de l'étendue de l'injustice commise en Palestine ainsi que des sentiments et des objectifs qui animent les Palestiniens.
  • D'autre part, ces conclusions fournissent une indication de ce que devrait être la solution juste et équitable du problème palestiniens. La connaissance des éléments d'une solution  juste et équitable est d'une importance primordiale à l'heure actuelle, car la résolution du Conseil de Sécurité du 22 novembre 1967 sur laquelle le monde fonde des espoirs de paix n'offre pas en vérité une solution adéquate. Cette résolution souffre d'une lacune fatale : elle s'occupe principalement de liquider les séquelles de la guerre du 5 juin 1967 tandis qu'elle ignore le fond même du problème, c'est à dire la question palestinienne. Et il ne semble pas que la paix puisse revenir en Terre Sainte si on cherche un règlement qui dépend du bon vouloir d'Israël et accorde plus de considération au fait accompli par la force qu'aux principes du droit et de la justice. Sans reconsidération de la résolution de partage et une réévaluation de la situation en Palestine, à la, lumière des principes du droit et de la justice, les efforts qu'on déploie pour aboutir à la paix resteront futiles. Il faudrait pouvoir combler le fossé, je dirais même l'abîme, entre la réalité et la légalité.