"Si
vous voulez partir de votre propre gré, c'est maintenant qu'il faut le
faire", avait lancé aux manifestants dans l'après-midi le chef
intérimaire de la police d'Ottawa Steve Bell, avertissant que ce
week-end serait "bien différent des trois derniers".
Dans la
soirée, la police a procédé aux premières arrestations: Tamara Lich,
l'une des organisatrices du convoi dit "de la liberté", a été
interpellée par la police, a indiqué dans un tweet le compte officiel du
mouvement, vidéo à l'appui.
Sur les images, on la voit monter
menottes aux poignets dans une voiture des forces de l'ordre, entourée
de deux policiers, et crier à ses compagnons "Tenez bon".
Un peu
plus tôt, un autre leader, Chris Barber, avait été interpellé, une
arrestation dans le calme là aussi filmée et postée sur les réseaux
sociaux par des membres du mouvement.
Pour la première fois
depuis le début du mouvement, des groupes de policiers s'étaient
positionnés en masse jeudi dans les rues d'Ottawa face aux
contestataires et aux centaines de camions bloquant les rues.
"Nous
sommes prêts à agir pour expulser les manifestants illégaux de nos
rues", avait encore expliqué Steve Bell, parlant d'une intervention
"imminente".
Un périmètre de sécurité a été érigé autour du
centre-ville et une centaine de barrages permettent de contrôler les
entrées dans la zone.
- Comptes bancaires gelés -
A
quelques mètres de là, le Premier ministre Justin Trudeau a estimé jeudi
matin que cette contestation n'avait plus rien de "pacifique", lors
d'un débat historique à la Chambre des communes portant sur la mise en
œuvre de la loi sur les mesures d'urgence, une disposition
exceptionnelle invoquée lundi pour la deuxième fois de l'histoire du
Canada en temps de paix.
"L'objectif de toutes les mesures, y
compris les mesures financières prévues dans la loi sur les mesures
d'urgence, est de faire face à la menace actuelle et de maîtriser
pleinement la situation", a ajouté Justin Trudeau.
Dans une lettre
adressée aux Premiers ministres des provinces mercredi soir, il avait
estimé que le mouvement "menaçait la démocratie" et minait "la
réputation du Canada à l'étranger".
Des "comptes bancaires
d'individus et d'entreprises" liés au blocage ont été gelés, a précisé
lors d'une conférence de presse la ministre des Finances et
vice-Première ministre Chrystia Freeland.
Qualifiant la situation
de "précaire", le ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino a
estimé que "les blocus illégaux aux frontières" avaient coûté des
milliards de dollars à l'économie canadienne.
Les manifestants,
déterminés à rester "jusqu'à la fin", avaient reçu mercredi un ultimatum
des forces de l'ordre, qui ont fait le tour des camions pour distribuer
un tract leur intimant l'ordre de "quitter les lieux".
"Ils
essaient de faire peur aux gens pour éviter qu'ils ne viennent ce
week-end", a commenté auprès de l'AFP le camionneur Kevin Veurink, 39
ans, réagissant à l'installation de barricades autour de l'enceinte
parlementaire.
Pull gris avec logo "Liberté ensemble" sur le dos,
cet Ontarien qui transportait un chariot avec des bidons d'essence se
dit prêt à rester "jusqu'à ce qu'on se fasse arrêter, si cela arrive".
Le
nouveau chef de la police d'Ottawa avait déclaré mercredi être prêt à
"employer certaines techniques qui ne sont pas couramment vues à
Ottawa".
- Situation périlleuse -
Un mélange de pluie et
de neige attendu mercredi et dans les prochains jours pourrait
compliquer les opérations de la police, confrontée à une situation
complexe et périlleuse pour déloger les manifestants sans heurts.
Elle
craint notamment la présence d'"éléments radicaux" mais aussi de
nombreux enfants dans la manifestation, y compris des bébés.
La
ville d'Ottawa, la province de l'Ontario et le Canada entier sont sous
état d'urgence en raison de ce mouvement de contestation sans précédent,
parti de l'opposition des camionneurs à se faire vacciner contre le
Covid-19 pour franchir la frontière entre le Canada et les Etats-Unis.
Minimisé
au départ par les autorités, le mouvement s'est étendu ces dernières
semaines à l'ensemble des mesures sanitaires et, pour de nombreux
manifestants, à un rejet du gouvernement de Justin Trudeau.
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Par Anne-Sophie THILL avec Geneviève NORMAND à Montréal
Mise à jour 18.02.2022 à 05:00