jeudi 19 août 2010

Justice et Paix en Palestine...

 Palestine - 19-07-2010

Conférence-débat Pour la Justice et la Paix en Palestine, avec la participation de Gilles Devers, avocat
Par Gilles Devers
Rencontre organisée par le Collectif Palestine-Marseille le samedi 19 juin 2010, salle Dugommier à Marseille

La conférence de Gilles Devers est introduite par Bernard, de COMAGUER, qui souligne qu’Israël est un Etat qui se moque du droit. Pierre Stambul, de l'Union juive française pour la paix, rappelle qu'il y a deux ans Israël avait bénéficié d'un statut de « rehaussement » au sein de l'Union européenne et que 3 mois après (décembre 2008 -janvier 2009) il attaquait Gaza. Trois semaines après son intégration dans l'OCDE, Israël attaque une flottille humanitaire, dans les eaux internationales, au large de Gaza, le 31 mai 2010. Face à l'impunité qui est la sienne et à la lâcheté internationale dont il bénéficie, seule la mobilisation internationale des sociétés civiles peut empêcher Israël de se placer au-dessus des lois.

Gilles Devers affirme que le droit est certes important, mais il ne prend véritablement tout son sens que lorsqu'il est au service d'une politique, lorsqu'il aide à lutter contre la politique d'Israël qui est une abomination en train de se passer en matière de droits de l'homme.

La politique d'Israël est non seulement injuste, elle est illégale, et c'est ici que le droit intervient, au service d'une cause politique, d'autant plus que la situation est en évolution. Lors des massacres de Sabra et Chatila (en septembre 1982), on ne disposait pas encore des moyens juridiques actuels. Israël ne peut pas continuer à se servir comme bon lui semble, en pensant que le conseil de sécurité de l'ONU ne réagira pas. Face à des actions jugées illégales, il y a lieu de saisir les juges. Le boycott n'est que le boycott de produits fruits d'un crime, celui de la colonisation.

Le droit est une science plutôt complexe mais il permet de travailler sur les droits fondamentaux et il est un langage commun. Ainsi, près d'une quarantaine d'avocats de différents pays sont actuellement en train d'échanger sur l'attaque de la flottille humanitaire. Même si les droits de l'homme sont une conception occidentale, il reste important d'échanger avec des avocats égyptiens, jordaniens, etc.
1- A propos de l'opération à Gaza, baptisée Plomb durci par Israël

Elle a fait l'objet d'une saisine de la Cour Pénale Internationale (
1) (CPI) de La Haye, réellement existante depuis le 1er juillet 2002 (entrée en vigueur du statut de la CPI dont la création est bien antérieure).
En matière de justice internationale, les délais de jugement sont très longs : Ainsi, le jugement sur Srebenica est intervenu 15 ans après le dépôt de plainte devant le Tribunal Pénal International pour l’Ex Yougoslavie. Il a fallu attendre 38 ans pour que soit jugé le Bloody Sunday en Irlande. Dans les deux cas, la CPI n’existait pas.

Mais le dossier de la Palestine bouge (voir le site internet de la CPI (
2). Au début, le scepticisme était dominant, car la Palestine n'est pas strictement un Etat. Mais le débat public a été ouvert par le procureur de la CPI, Luis Moreno Ocampo, contrairement à la question de l'Irak dont le dossier avait vite été refermé.
Il faut agir là où on peut. Le procureur est maintenant légalement dans l'obligation de saisir la chambre préliminaire qui étudie la validité des requêtes, en vue d'autoriser ou non une procédure d'enquête. Il ne faut sans doute pas s'attendre à ce qu'un mandat d'arrêt soit lancé contre Ehud Olmert. Mais il y aura au moins un débat public, avec audition des victimes, pour permettre à la chambre préliminaire de la CPI de se prononcer sur la question suivante : «
Est-il raisonnable de penser que des crimes de guerre et crimes contre l’humanité ont été commis à Gaza ? » (réponse positive déjà apportée à l'ONU par le juriste sud-africain Goldstone). Selon le modèle de raisonnement que la CPI a suivi dans son arrêt KENYA du 31/3/2010, celui-ci a autorisé le procureur à ouvrir une enquête sur la situation au Kenya. Cet arrêt a précédé de peu l'ouverture du débat public sur Plomb durci, le 5/5/2010. Israël aura alors deux possibilités : soit snober le débat public, soit y participer, mais ce faisant, il reconnaîtrait alors la CPI qu'il n'a pas reconnue jusqu'à maintenant.

Les Palestiniens sont hélas peu présents à la CPI. Les critiques à l'encontre de celle-ci ne manquent pas, mais c'est pourtant à la CPI que pourrait s'écrire le droit postcolonial.

A l'ONU, on se contente de faire des phrases. Le conseil des droits de l'homme est frappé de discrédit. Même si les USA, la Chine et Israël ne reconnaissent pas la CPI, 110 Etats (sur les 192 qui siègent à l'ONU) ont ratifié sa création dont il est vrai assez peu de pays musulmans, aux notables exceptions de la Jordanie, de Djibouti, des Comores...

Les réticences du monde arabo-musulman s'expliquent probablement par le mandat d'arrêt lancé contre le président soudanais Omar Al Béchir, à la suite d'une plainte portée par l'ONU, que le procureur a été obligé d'instruire, puisque elle émanait de l'ONU. Il est en tous les cas très fâcheux d'entendre l'Organisation de la conférence islamique (57 pays) tenir un discours condamnant le sionisme, mais dans le même temps s'abstenir de participer à la CPI. Ainsi, la Turquie, qui a signé la convention européenne des droits de l'homme, refuse de ratifier la création de la CPI !

Car la justice de la CPI est une justice défendable, qui va bien au-delà du droit-de-l'hommisme occidental. Elle ne peut juger que des individus (et non des Etats) et sa compétence est limitée aux trois crimes les plus graves en droit international :
q le génocide, q le crime de guerre, q le crime contre l'humanité.
2 - Sur le boycott

Si Israël ne ratifie aucun traité (comme par exemple la convention internationale sur la mer, évocable dans l'attaque de la flottille), il n'en a pas moins passé des accords douaniers avec l'Europe dont la responsabilité est d'autant plus engagée qu'elle jouit de la stabilité et de structures juridiques forte.

Il se trouve que la Cour Européenne de Justice du Luxembourg a pris une décision très importante, le 25/2/2010 : l'arrêt
Brita (firme allemande associée à la société israélienne Soda-club dont le site de production est implanté à Mishor Adumin, en Cisjordanie.). La presse en a peu rendu compte. A partir d'une simple affaire de droits douaniers exigibles, réclamés par les douanes de Hambourg, cette cour de justice a confirmé que la seule frontière d'Israël opposable en droit était celle de 1967 et que après 1967 les extensions israéliennes étaient de l'occupation et rien d'autre. Les tarifs douaniers préférentiels dont Israël bénéficie ne peuvent donc s'appliquer à des produits venant des colonies ou des territoires occupés. L'arrêt Brita stipule aussi dans ses attendus, que l'origine des produits déclarée par Israël n'est pas fiabl

A Marseille, début septembre, devrait avoir lieu un dépôt de plainte contre AGREXCO dont 70 % des produits exportés en Europe proviennent en réalité des colonies ou des territoires occupés. Or, depuis l'affaire Brita, tous les certificats d'exportation d'Israël sont devenus douteux. Une expertise des certificats d'AGREXCO va être demandée, avec vérification sur place. Puis, la chaîne du transport va être reconstituée. S'il s'avère que les produits viennent des colonies, l'application du droit né de l’arrêt Brita sera demandée.

Pour les actions de boycott (cf la campagne BDS France, boycott-désinvestissement-sanction), des modèles de plainte sont disponibles sur le site BDS sur Internet (
3). Deux infractions peuvent être alléguées :
1) la tromperie sur l'origine. Un vin d'Alsace, par exemple, ne peut pas être vendu comme un Bordeaux. Mais il semble que Michèle Alliot-Marie ne soit pas encore convaincue de ce raisonnement que les procureurs risquent de ne pas suivre.
2) la plainte en droit douanier apparaît plus prometteuse, sur la base de l'application de l'arrêt
Brita, l'intérêt des Douanes étant de percevoir le plus possible de taxes. A cet effet, il faut écrire à la direction des douanes pour qu'elle taxe ce qui est légalement taxable et in fine pour obtenir l'interdiction d'importation de produits illégaux, dès lors qu'ils proviennent des colonies.

Une demande d'étude a été faite aux parlementaires européens pour évaluer les taxes douanières perdues depuis une dizaine d'années au bénéfice d'Israël. Plusieurs centaines de millions pourraient être en jeu et pourquoi pas ultérieurement redistribuées aux Palestiniens... puisque la colonisation est juridiquement un crime au sens de la CPI. La colonisation se définit en effet comme un crime, sur la base de 2 éléments :
1) l'appropriation des richesses d'un autre Etat par la force armée (exemples des colonies et de Jérusalem-est), sinon il faudrait admettre la légitimité du braquage d'Etat.
2) le transfert de populations, le fait de chasser un peuple de sa terre.

La question se pose aussi de la légalité des marchés publics pour l'eau, l'électricité, le tramway de Jérusalem, les ordures ménagères... comme pour le marché gagné par une société française dont le siège est à La Défense, à proximité d'un commissariat de police ! Des mises en demeure vont lui être adressées, pour mettre en évidence sa participation à une politique d'apartheid (routes pour les Israéliens, routes pour les Palestiniens) et lui rappeler que tous les pays européens ont ratifié la création de la CPI qui est habilitée à condamner les cadres des entreprises européennes impliqués dans des travaux au bénéfice d'Israël, concernant territorialement les colonies ou les territoires occupés.

S'agissant d'AGREXCO, il faut aussi préciser que cette société débarque actuellement ses produits dans le port de Marseille. Mais pour Georges Frêche, le président de la région Languedoc-Roussillon, deux ports valent mieux qu'un et il nourrit le projet d'accueillir Agrexco à Sète, voire de ravaler Marseille à un simple port de pêche, comme il l'a déclaré !... L'Etat et la Région se sont engagés dans ce projet. Une requête va être déposée début juillet devant le tribunal administratif de Montpellier en vue de l'annulation de l'arrêté préfectoral autorisant l'aménagement portuaire en faveur d'Agrexco. Il sera plaidé que la colonisation est un crime, que les produits des colonies sont un crime et qu'il ne peut y avoir de développement économique fondé sur le crime.
3 – Sur l'attaque de la flottille

Le dépôt d'une plainte a eu lieu à Marseille par l’avocate M.Z du CBSP qui a été pris en otage sur le Mavi Marmara. Une concertation importante a lieu entre des avocats de plusieurs nationalités, ainsi notamment qu'avec le CBSP, Mireille Mendès-France et l'avocat Daniel Machover à Londres. Concernant les bateaux de la flottille, il sera plaidé que tous les passagers ont eu le statut de victime : les tués, les blessés par l'armée israélienne, mais aussi les emprisonnés par les autorités israéliennes (c’est-à-dire tous). L'action est menée sur la base de la compétence du lieu où a été commis le crime, autrement dit le bateau qui représente une parcelle de l'Etat dont il arbore le pavillon.

Un Grec et un Comorien qui ont été blessés appartiennent à des pays qui ont reconnu la CPI, d'où le raisonnement que les plaintes de ces passagers sont légalement recevables devant la CPI. L'attaque est de plus contraire au droit international. Il y a manifestement crime de guerre, quand il y a une opération d'assaut menée par hélicoptère contre un convoi humanitaire, en temps de paix, dans les eaux internationales.
En conclusion,

Gilles Devers évoque une réunion qui s'est tenue à l'Assemblée nationale avec les Français membres de la flottille, non blessés, mais arbitrairement emprisonnés. Certains médias (
Reuters, Al Jazeera) ont bien fait leur travail de journalistes et rendu compte de la réunion. Les autres se sont contentés d'interviewer, de manière nulle et anecdotique, des militants du CBSP. Pour l'anecdote, un militant de la flottille a eu quelques problèmes pour entrer à l'Assemblée nationale : il ne disposait plus de papiers, dérobés par un voleur assez bien identifiable ! Il a fini par être admis sans papier.

Ehud Barak, ministre de la défense d' sraël, qui devait présider un salon de l'armement, a finalement renoncé à venir en France.

Bien que notre ministre des affaires étrangères ait conçu un projet d'accueil juridique adapté (tout Français victime d'agression à l'étranger peut porter plainte en France), les plaintes relatives à l'assaut de la flottille devraient plutôt être déposées devant la CPI qu'en France... qui ne reconnaît pas le crime de guerre. Il existe cependant en France une exception de compétence universelle, justement pour les bateaux !
DEBAT – Questions-réponses

1) Juridiquement, il n'y a pas d'Etat de guerre entre Israël et le Hamas.

2) Il existe un droit de visite sur les bateaux, seulement pour trois motifs : le trafic de stupéfiants, l'esclavage, le doute sur la nationalité du bateau. Il n'existe pas de droit de visite pour les armes.

3) Le blocus est un acte de guerre.

4) Sur la compétence universelle, le débat est complexe (cf Guinée-Conakry). En France, le crime de guerre n'est pas défini. La France a bien ratifié le traité de la CPI, mais ne l'a pas mis en œuvre. La compétence universelle a été appliquée par la Belgique, l'Espagne (affaire Pinochet et affaire des militaires argentins), l'Angleterre, la Grèce. Mais la crise est là et l'application n'est pas toujours garantie, quand des parlements conservateurs arrivent au pouvoir.

Amira AlQarem et Gilles Devers devant la CPI (31 août 2009)

5) S'agissant d'Amira, une jeune palestinienne ayant perdu une jambe pendant Plomb durci, Gilles Devers apporte les précisions suivantes : Amira se trouvait dans sa maison avec son père, sa sœur et son frère, dans un quartier périphérique calme de Gaza qui n'avait pas été bombardé. Mais des chars israéliens arrivent juste devant la maison. La nuit tombe. Les enfants vont se coucher. Le père ouvre la porte donnant sur l'extérieur. Un premier tir depuis un hélicoptère de combat souffle la porte et abat le père. Un deuxième tir touche Amira arrivée auprès de son père. « J'ai compris que je ne dirai jamais plus papa », dira-t-elle plus tard. Elle saigne abondamment. Son frère et sa sœur partis chercher du secours sont à leur tour abattus par un hélicoptère de combat. Amira a tenu seule pendant 38 heures, jusqu'à ce qu'un journaliste la trouve et l'emmène à l'hôpital. Mohamed Salem, un médecin palestinien travaillant à Lille, n'a eu de cesse de la faire sortir et y est finalement parvenu, après 3 refus successifs de l'Egypte. Amira, qui n'a que 16 ans, a décidé de demander justice. « Il y a trop de violences, il faut que la justice passe », a-t-elle déclaré. Elle est la première enfant à déposer plainte au CPI. Pas dans l'idée d'une indemnisation, comme beaucoup de Palestiniens qui se réjouissent de n'être pas morts ou d'être libres après avoir été prisonniers. « Je suis vivante », se réjouit-elle.

Un autre dossier est évoqué par Gilles Devers, celui d'un Palestinien dont l'implantation de la famille à Gaza a pu être remontée jusqu'en 1390. Sa mère, née en 1948, a eu 14 enfants, tous ayant reçu une très bonne éducation. 3 sont devenus professeurs d'université. Quant à lui, passionné d'astronomie, il apprenait à voir les étoiles aux enfants de Gaza et il a été vite recruté par la NASA. Sa maison de Gaza a été détruite. Il a perdu un de ses fils. Sa mère a été grièvement blessée.

6) A propos du tribunal Russell, Gilles Devers se dit réservé sur le fait d'entretenir l’idée d’un tribunal qui n’en est pas un. Les temps ont changé depuis le tribunal Russell qui avait été mis en place comme un tribunal d'opinion, pour défendre le Vietnam attaqué par les Etats-Unis. Il existe maintenant la CPI. Et ne rien faire devant la CPI, c'est d'une certaine façon participer à la culture de l'impunité. Il faut utiliser le vrai droit. Il y a des outils efficaces à mettre en œuvre. La CPI est le seul tribunal pour traiter de la Palestine.

7) A la question de savoir si la Palestine est ou non un Etat, Gilles Devers pense que la Palestine est bien un Etat, puisque les Palestiniens ont un passeport. A propos du Congo, la CPI a jugé que la nationalité était quelque chose de substantiel et pas seulement formel.

8) Le rapport Goldstone est certes intéressant, mais il y a plus intéressant encore, le rapport que John Dugard (
4) a effectué pour la Ligue arabe, démontrant la volonté d'affamer les populations par l'abattage des troupeaux et des poulaillers.
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=15574

9) Il n'existe pas de code en droit international. C'est la jurisprudence qui est déterminante. Le système se construit peu à peu sur cette base.

10) Un dossier particulier est expliqué par G. Devers : un homme, né en Palestine, devenu ingénieur après des études en Yougoslavie, a créé une famille en France et pris la nationalité française. En avril dernier, il a voulu rendre visite à sa famille palestinienne à Hébron. Tout s'est bien passé, jusqu'au jour où il a voulu rentrer chez lui en France, chargé d'une grosse valise. Les soldats israéliens l'ont menacé et multiplié les tracasseries administratives. Agé de 60 ans, diabétique, il a dû rester toute la journée au checkpoint, en plein soleil. Victime d'une crise cardiaque, il est mort dans le taxi qui le conduisait à l'hôpital. Sa famille est décidée à faire un procès en France. Celui-ci est jouable devant la CIVI (commission d'indemnisation des victimes d'infractions) pour obtenir une indemnisation d'un fonds d'Etat, lequel devra chercher à récupérer en Israël l'argent versé. Les bases juridiques de la plainte sont : menaces avec armes, homicide, non assistance à personne en danger.

11) Le dossier de Jenin 2002 est actuellement devant un juge espagnol.
Notes de lecture :

(1) http://www.icc-cpi.int/Menus/ICC/About+the+Court/Frequently+asked+Questions/
(2) http://www.icc-cpi.int/Menus/ICC/Structure+of+the+Court/Office+of+the+Prosecutor/
(3) http://www.bdsfrance.org/index.php?option=com_content&view=article&id=68&Itemid=55
(4) professeur de droit, ancien rapporteur de l’ONU sur la Palestine. Il conclut à la réalité des crimes, à la nécessité d’une enquête et à la compétence de la Cour Pénale Internationale.
Compte-rendu de Nicole AMPHOUX, Marseille, le 28 juin 2010

Lire également :
- "Plomb durci: La défense des victimes progresse", par Gilles Devers, ISM, 7.10.2009.
- "Belgique : dépôt d'une plainte contre 14 dirigeants israéliens", par Jean-Pierre Stroobants,
 23.06.2010.


Publié le 20 juillet  2010 par ISM

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